Lanceurs d’alerte : quand et comment adresser une alerte à la DGEFP ?

La Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) met en place un dispositif spécifique pour recueillir et traiter les signalements des lanceurs d’alerte dans le champs de l’emploi et de la formation professionnelle.

Relevez-vous du régime des lanceurs d’alerte ?

Qu’est-ce qu’une alerte ?

Une alerte est un signalement ou un dévoilement de faits portant sur la violation de textes en vigueur ou un risque d’atteinte à l’intérêt général.

Le signalement est porté à la connaissance de l’employeur, d’une autorité administrative ou est rendu public. Il peut intervenir dans le cadre d’une relation professionnelle (salarié ou ancien salarié, actionnaire…) ou en dehors de tout contexte professionnel (citoyen, usager du service public…).

Un certain nombre de conditions prévues par la loi doivent être remplies pour permettre à l’auteur du signalement de bénéficier du régime de protection des lanceurs d’alerte.

Pouvez-vous être un lanceur d’alerte ?

Un lanceur d’alerte est une personne physique. Une personne morale (entreprise ou association par exemple) ne peut pas être lanceur d’alerte. Elle peut néanmoins bénéficier des protections accordées aux facilitateurs (personnes aidant le lanceur d’alerte dans sa démarche de signalement).

Un lanceur d’alerte signale ou divulgue des informations de bonne foi et sans contrepartie financière directe.

Si les informations que vous signalez ont été obtenues en dehors d’un cadre professionnel, vous devez en avoir eu professionnellement connaissance. Si vous vous contentez de relayer l’information détenue par une autre personne, vous ne serez pas reconnu comme lanceur d’alerte.

Vous pouvez être considéré comme lanceur d’alerte et bénéficier d’un statut protecteur seulement si :
 

  • Vous répondez à la définition prévue par la loi ;
  • Vous respectez à la procédure prévue pour signaler les faits de votre alerte.

Sur quoi peut porter votre alerte ?

Les informations pouvant être signalées au titre d’une alerte doivent concerner des situations susceptibles de constituer :
 

  • Un crime ;
  • Un délit ;
  • Une menace ou un préjudice pour l’intérêt général ;
  • Une violation ou une tentative de dissimulation d’une violation (d’un engagement international ; d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement ; du droit de l’Union européenne ; de la loi ou du règlement).

Seules les informations présentant un caractère illicite ou portant atteinte à l’intérêt général peuvent faire l’objet d’un signalement. De simples dysfonctionnements dans une entité publique ou privée ne peuvent fonder une alerte.

Votre signalement ne peut pas porter sur des informations ou des documents relatifs au secret de la défense nationale, au secret des délibérations judiciaires, au secret de l’enquête ou de l’instruction judiciaire, au secret professionnel de l’avocat.

En divulguant de telles informations, vous prenez non seulement le risque de ne pas être protégé mais aussi, dans certains cas, celui de commettre une infraction.

Que peut contenir une alerte adressée à la DGEFP ?

La DGEFP peut être saisie de signalements de faits portant sur la violation de textes en vigueur ou un risque d’atteinte à l’intérêt général dans le champs de l’emploi et de la formation professionnelle.

Plus précisément, les thématiques traitées par la DGEFP dans le champs de l’emploi et de la formation professionnelle sont les suivantes (liste non exhaustive) :
 

  • Les parcours d’accès à l’emploi (emploi des jeunes, emploi des travailleurs handicapés et insertion professionnelle) ;
  • Les mutations économiques et les dispositifs de sécurisation de l’emploi (assurance chômage, fonds national de l’emploi, activité partielle, accompagnement et développement des compétences) ;
  • Les politiques de formation et contrôle (alternance et accès aux qualifications, financement de la formation, compte personnel de formation, titres et certifications professionnels, formation professionnelle continue, organismes de formation) ;
  • Les plans d’investissements dans les compétences et les conventions conclues à cet effet ;
  • Les subventions versées par la DGEFP dans les domaines précités (tout financement alloué qui serait vicié).

Vous pouvez retrouver le détail du champ de compétence de la DGEFP en cliquant sur ce lien.

La DGEFP n’est en revanche pas compétente pour traiter des signalements portant sur les relations individuelles et collectives de travail. Cela relève du champ de compétence d’une autre autorité la Direction générale du travail (DGT).

Les infractions pénales doivent être portées directement à la connaissance du procureur de la République.

Les plaintes portant sur une situation individuelle ne sont pas considérées comme des alertes (exemple : délai de traitement de votre dossier par un opérateur de l’Etat soumis à la tutelle de la DGEFP). Les personnes concernées doivent s’adresser à l’opérateur ou à l’administration qui suit le dossier.

Lorsqu’une alerte relève de l’un de ses domaines de compétence, la DGEFP étudie elle-même le signalement. Lorsqu’une alerte relève du champ de compétence d’une autre entité désignée par le décret n°2022-1284 du 3 octobre 2022, la DGEFP transfère le signalement à l’entité concernée.

La procédure définie par le DGEFP pour le recueil et le traitement des signalements qui lui sont adressés peut être consultée en cliquant sur ce lien.

Conseils pratiques

Avant d’adresser une alerte à la DGEFP assurez-vous :
 

  • Qu’elle ne porte pas sur une réclamation/situation individuelle liée à une demande administrative ou sur un dysfonctionnement organisationnel ;
  • Qu’il n’existe pas une autre voie de droit plus adéquate pour signaler les faits en cause ;
  • De disposer d’éléments concerts sur les informations que vous souhaitez signaler (mails, documents financiers …)

En cas de doute, vous pouvez adresser votre signalement au Défenseur des droits qui se chargera de réorienter votre alerte vers l’autorité administrative compétente pour en assurer le traitement.

Comment adresser une alerte à la DGEFP ?

Les signalements peuvent être adressés à la DGEFP :

  • Par voie postale, sous double enveloppe

Sur l’enveloppe extérieure, mentionner l’adresse d’expédition :
Ministère du travail, du plein emploi et de l’insertion
Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), Pôle juridique
14 Avenue Duquesne
75350 PARIS SP 07

Sur l’enveloppe intérieure, inscrire exclusivement la mention : « signalement d’une alerte au titre de la loi du 9 décembre 2016 effectué le [date de l’envoi] »

Un accusé de réception sera adressé à l’auteur de l’envoi dans un délai de sept jours à compter de la date à laquelle le signalement a été adressé.

Un numéro identifiant sera communiqué au lanceur d’alerte. Il sera ensuite utilisé pour les échanges avec la DGEFP.

Quelles suites peuvent être données par la DGEFP à votre signalement ?

La DGEFP dispose d’un délai de trois mois à compter de l’accusé de réception du signalement pour communiquer par écrit à l’auteur du signalement non anonyme des informations sur les mesures envisagées ou prises pour évaluer l’exactitude des allégations et, le cas échéant, remédier à l’objet du signalement.

Pour évaluer l’exactitude des allégations formulées dans les signalements et remédier à leur objet, la DGEFP peut notamment prendre les mesures suivantes :
 

  • Solliciter ses services au niveau déconcentré, notamment ses services de contrôle ;
  • Solliciter les opérateurs dont elle assure la tutelle ;
  • Solliciter tout organisme privé ou public qui agit pour son compte ;
  • Diligenter des audits ;
  • Suspendre ou mettre fin à des conventions ;
  • Suspendre ou mettre fin à des versements ;
  • Procéder à la récupération d’indus, le cas échéant ;
  • Modifier les nominations relevant de sa compétence ;
  • Prendre toutes les mesures nécessaires à la protection des données à caractère personnel et des droits des personnes pour les traitements relevant de sa responsabilité ;
  • Procéder à des mises en demeure ;
  • Retirer des agréments ou des autorisations qui relèvent directement de sa compétence ;
  • Alerter le Procureur de la République des faits susceptibles de constituer un crime ou un délit.

Quelles sont les garanties et les protections accordées à un lanceur d’alerte ?

Quelle procédure suivre pour bénéficier des mesures de protection ?

La loi prévoit deux voies de signalement pour procéder à une alerte :
 

  • La procédure interne  : elle consiste à dresser le signalement à une personne dédiée au sein de la structure professionnelle ou en l’absence de personne compétente, au supérieur hiérarchique direct ;
  • La procédure externe : elle consiste à adresser le signalement à une institution publique désignée à cet effet, à savoir :
     une autorité mentionnée en annexe du décret n°2022-1284 du 3 octobre 2022 en fonction du champ de l’alerte ;
     le Défenseur des Droits ;
     l’autorité judiciaire ou une institution ;
     une organe ou organisme de l’Union européenne.

La voie de signalement interne doit être privilégiée lorsque le lanceur d’alerte n’est pas exposé au risque de faire l’objet d’une mesure de représailles et en l’absence de risque de destruction de preuves.

La loi autorise le lanceur d’alerte à effectuer une divulgation publique si et seulement s’il se trouve dans l’une des situations suivantes :
 

  • Carence d’une autorité externe dans le traitement du signalement qui lui a été adressé (absence de retour de l’autorité trois mois près le signalement, 6 si l’affaire est complexe) ;
  • Danger grave et imminent dans le cas où les informations n’ont pas été obtenues dans le cadre professionnel ;
  • Danger imminent ou manifeste pour l’intérêt général dans le cas où les informations ont été obtenues dans le cadre professionnel ;
  • Risque de représailles.

Garanties de confidentialité, en particulier en matière de données à caractère personnel

Le régime de protection des lanceurs d’alerte garantit la confidentialité des informations recueillies dans le signalement, sur l’identité de l’auteur du signalement, des personnes visées et des tiers mentionnés.

Les éléments de nature à identifier le lanceur d’alerte ne peuvent pas être divulgués sans son accord. Ils peuvent néanmoins être transmis à l’autorité judiciaire dans certaines situations (obligation de dénoncer des crimes ou des délits). Ils peuvent être transmis au Défenseur des droits ou à l’autorité externe compétente lorsque le signalement ne relève pas de la compétence de la DGEFP, dans des conditions permettant de garantir la confidentialité et l’intégrité des informations contenues dans le signalement.

Dans les deux situations, le lanceur d’alerte est alors informé.

Dans le cadre du recueil et du traitement de votre alerte, la DGEFP assure la protection de vos données personnelles ainsi que de celles de la ou des personnes mises en cause par l’alerte, dans le respect des dispositions du règlement général de protection des données et de la loi Informatique et Libertés ainsi que des recommandations de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.

A ce titre, la DGEFP met en place des outils sécurisés de recueil de votre alerte ainsi que des canaux sécurisés pour échanger avec vous dans le cadre du suivi de votre alerte. Elle définit une politique stricte d’accès aux données personnelles et de leur conservation, fondée sur la stricte nécessité pour le traitement de l’alerte. Le contenu des éléments signalés via les canaux dédiés à cet effet n’est accessible qu’à des agents dûment habilités.

Les principales informations relatives au traitement de données à caractère personnel mis en œuvre pour assurer le recueil et le traitement des alertes par la DGEFP, notamment les modalités d’exercice de vos droits, peuvent être consultées en cliquant sur ce lien.

Irresponsabilité civile

Lorsque la procédure de signalement ou de divulgation publique est respectée, un lanceur d’alerte ne peut pas être reconnu civilement responsable de dommages causés par son signalement dès lors qu’il avait des motifs raisonnables de croire, lorsqu’il y a procédé, que le signalement ou la divulgation publique de l’intégralité de ces informations était nécessaire à la sauvegarde des intérêts en cause.

Irresponsabilité pénale

Lorsque la procédure de signalement ou de divulgation publique est respectée, les bénéficiaires de la protection ne sont pas responsables pénalement.

Il faut notamment que la divulgation publique soit :
 

  • Nécessaire et proportionnée à la sauvegarde des intérêts en cause ;
  • Intervienne dans le respect des procédures de signalement prévues par la loi Sapin 2 ;
  • Emane d’une personne répondant aux critères de définition du lanceur d’alerte.

A noter : la divulgation n’est possible que dans quatre hypothèses :
 

  • Si vous avez une autorité externe qui ne vous a pas apporté de réponse appropriée dans les délais requis ;
  • En cas de danger grave et imminent pour les alertes qui ne portent pas sur des informations obtenues dans un cadre professionnel ;
  • En cas de danger imminent ou manifeste pour l’intérêt général, pour les alertes qui portent sur des informations obtenues dans un cadre professionnel ;
  • Si vous risquez des représailles en saisissant l’autorité externe ou si l’autorité ne permet pas de remédier efficacement à l’objet de votre alerte.

Protection contre les mesures de représailles}

Lancer une alerte est un droit. Le législateur protège ceux qui font usage de ce droit en interdisant toute forme de représailles à l’encontre des lanceurs d’alerte et en donnant à ces derniers les moyens de se défendre s’ils en sont victimes.

Grâce au statut de lanceur d’alerte, l’auteur du signalement est un salarié protégé. Les mesures de protection attachées au statut de lanceur d’alerte visent notamment à prévenir toute mesure de représailles, de menaces ou de tentatives de représailles contre l’auteur du signalement. Le lanceur d’alerte bénéficie d’une protection contre les mesures de représailles suivantes :
 

  • Suspension, mise à pied, licenciement ou mesures équivalentes ;
  • Rétrogradation ou refus de promotion ;
  • Transfert de fonctions, changement de lieu de travail, réduction de salaire, modification des horaires de travail ;
  • Suspension de la formation ;
  • Evaluation de performance ou attestation de travail négative ;
  • Mesures disciplinaires imposées ou administrées, réprimande ou autre sanction, y compris une sanction financière ;
  • Coercition, intimidation, harcèlement ou ostracisme ;
  • Discrimination, traitement désavantageux ou injuste ;
  • Non-conversion d’un contrat de travail à durée déterminée ou d’un contrat temporaire en un contrat permanent, lorsque le travailleur pouvait légitimement espérer se voir offrir un emploi permanent ;
  • Non-renouvellement ou résiliation anticipée d’un contrat de travail à durée déterminée ou d’un contrat temporaire ;
  • Préjudice, y compris les atteintes à la réputation de la personne, en particulier sur un service de communication au public en ligne, ou pertes financières, y compris la perte d’activité et la perte de revenu ;
  • Mise sur liste noire sur la base d’un accord formel ou informel à l’échelle sectorielle ou de la branche d’activité, pouvant impliquer que la personne ne trouvera pas d’emploi à l’avenir dans le secteur ou la branche d’activité ;
  • Résiliation anticipée ou annulation d’un contrat pour des biens ou des services ;
  • Annulation d’une licence ou d’un permis ;
  • Orientation abusive vers un traitement psychiatrique ou médical.

Tous les actes cités ne sont pas nuls par principe. Ils sont nuls si l’auteur du signalement peut prouver que l’intention de la mesure a été de le sanctionner en raison du signalement qu’il a émis.

Il appartient au lanceur d’alerte de se prévaloir de sa qualité devant le juge afin de demander l’annulation d’une mesure de représailles et de se défendre au cours d’une instance civile ou pénale.

Conformément aux dispositions de la loi, le lanceur d’alerte bénéficie de mesures de protection, quelle que soit la procédure employée, et dans le respect des conditions de celle-ci, pour procéder à son signalement.

Ses frais de justice peuvent être pris en charge selon les modalités prévues par la loi et il peut bénéficier de conseils confidentiels.

Comment contacter le Défenseur des droits au sujet des alertes ?

Pour toute question sur le statut des lanceurs d’alerte ou pour adresser directement une alerte si vous ne savez pas qui est l’autorité compétente pour la traiter, vous pouvez contacter le Défenseur des droits en charge de coordonner l’action des autorités externes en matière de signalement des lanceurs d’alerte :
 

  • Par voie postale, sous double enveloppe :
     Sur l’enveloppe extérieure mentionner l’adresse d’expédition :
    Défenseur des droits
    Libre réponse 71120
    75432 PARIS CEDEX 07

     Sur l’enveloppe intérieure, inscrire exclusivement la mention suivante :
    Signalement d’une alerte au titre de la loi du 9 décembre 2016
    Effectué le [date de l’envoi]
  • Par voie électronique, en renseignant le formulaire en ligne ;
  • Par voie téléphonique au 09.69.39.00.00, du lundi au vendredi de 8h30 à 19h00 (coût d’un appel local).

Le lanceur d’alerte peut adresser des documents de divers formats par la voie du téléservice sur lequel il émet un signalement électronique ou vocal. En cas de transmission par voie postale, le lanceur d’alerte doit privilégier l’envoi par courrier recommandé avec accusé de réception. Il doit toujours conserver les originaux et n’adresser que des copies.

Pour en savoir davantage sur les lanceurs d’alerte, vous pouvez consulter le guide du lanceur d’alerte du Défenseur des droits.