Rapport de l'IGAS | « Pauvreté et conditions de vie des jeunes dans le monde rural : Comment adapter les réponses institutionnelles ? »
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Issu d'une mission menée en 2024 par Noor-Yasmin Djataou, Hélène Furnon-Petrescu et Carine Seiler, inspectrices générales des affaires sociales, le rapport Pauvreté et conditions de vie des jeunes dans le monde rural : Comment adapter les réponses institutionnelles ? a été publié sur le site de l'IGAS en janvier 2025.
Identifiant trois millions de jeunes âgés de 15 à 29 ans vivant dans les territoires ruraux, le rapport estime que 338 000 d'entre eux vivent sous le seuil de pauvreté et revient sur plusieurs difficultés auxquelles ils sont confrontés : éloignement des services publics, accès plus complexe à la mobilité, au logement...
Les inspectrices observent un taux de chômage de 22,4 % et un taux d'emploi précaire (en CDD ou en intérim) de 37,8 % au sein de cette population. Cela conduit à des départs contraints qui jouent un rôle démographique négatif pour bon nombre de ces territoires. « À l’instar des jeunes des banlieues, les jeunes ruraux, issus en grande majorité de milieu populaire, faiblement diplômés, se trouvent placés face au dilemme récurrent : quitter leur territoire ou trouver un emploi pour y rester », résument-elles.
Pour apporter des réponses nouvelles à ces problématiques, le texte formule une trentaine de propositions.
Au service de l’égalité des chances, mettre en place les mécanismes d’une politique prioritaire destinée aux jeunes ruraux, adaptée aux spécificités de la non-densité
- Retenir un cadre de priorisation des publics vulnérables dans les territoires ruraux, afin de cibler les territoires dans lesquels les populations sont confrontées à de fortes difficultés économiques et sociales (France ruralité revitalisation plus - FRR +) ;
- Intégrer, dans ces territoires, des priorités d’accès aux programmes d’accompagnement vers l’emploi ou la formation, sur le modèle de ce qui est mis en place dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) ;
- Compenser les coûts spécifiques liés à la ruralité pour les opérateurs d'accompagnement socio-professionnel.
Organiser, pour les jeunes ruraux les plus vulnérables, la grande proximité des actions d’accompagnement et la coopération des intervenants, les inscrire dans la durée
- Pérenniser et étendre les promotions 16-18 hors-les-murs et l’implantation d’antennes des écoles de la deuxième chance (E2C) dans ces territoires ;
- Créer un volet pour les jeunes dans chaque appel à manifestation d'intérêt régional pour l'offre de repérage et de remobilisation (O2R) ;
- Favoriser la mise en œuvre, dans tous les départements, d’une offre de prévention spécialisée.
Favoriser l’implantation de l’offre de formation en cohérence avec les enjeux de la ruralité, à travers un mix proximité et mobilité
- Dans le cadre des Pactes régionaux d’investissement dans les compétences, intégrer des objectifs de développement de l’offre de formation en « ruralité » ;
- S'appuyer sur des leviers de financement pour favoriser l'offre de formation rurale, à travers des mécanismes de compensation des coûts, d'habilitation de service public, de prise en compte de la résidence dans un territoire prioritaire ;
- Relancer un appel à manifestation d'intérêt pour poursuivre le développement des campus connectés ;
- S'appuyer sur les appels à projets régionaux de France 2030 pour développer l'offre de formation.
Poursuivre le déploiement en grande proximité des dispositifs de santé
- Développer les maisons des adolescents et les autres outils d'aller vers en santé mentale ;
- Maintenir un volet santé dans l'accompagnement des jeunes par les missions locales.
Mieux accompagner l’acquisition effective de la mobilité physique et cognitive
- Lever les freins à la mobilité à travers des accompagnements individualisés s'appuyant notamment sur les bilans mobilité déployés par France Travail ;
- Renforcer les aides à la mobilité des jeunes accompagnés par le service public de l’emploi (aide au permis de conduire, aide subsidiaire à la mobilité...) ;
- Poursuivre le déploiement des simulateurs de conduite dans les missions locales ;
- Inclure cet enjeu dans les contrats opérationnels de mobilité.
Adapter les critères d’attribution des allocations d’insertion et d’accompagnement socioprofessionnel pour l’ensemble des jeunes en difficulté, dont les jeunes ruraux et renforcer leur accès aux droits
- Ouvrir de nouvelles possibilités de majoration du contrat d'engagement jeune (CEJ) pour les mineurs ruraux ;
- Étendre également la durée de l'allocation du CEJ pour certains jeunes en très grande vulnérabilité, avec une application progressive des exigences d'heures d'activité ;
- Sanctuariser les crédits du parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie (PACEA) ;
- Proposer à tous les jeunes un rendez-vous des droits à l’occasion de la journée défense et citoyenneté (JDC), en associant tous les acteurs, notamment ceux du service public de l'emploi.
Organiser une approche intégrée et systémique de la jeunesse – et notamment de la jeunesse rurale – dans les politiques structurantes nationales et, au plan territorial, développer la coordination de l’action publique avec les acteurs concernés pour une meilleure gouvernance
- Améliorer la connaissance et le suivi statistique de la situation des populations, et en particulier des jeunes, selon les territoires de résidence ;
- Renforcer les missions de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) ;
- Intégrer un axe jeunesse, tenant compte des problématiques rurales, aux stratégies et grands plans structurants nationaux ;
- Conforter un pilotage interministériel jeunesse auprès du Premier ministre ;
- Mettre en place une conférence de la jeunesse au moins tous les trois ans réunissant les acteurs nationaux et précédée de conférences territoriales, appuyées par des démarches de participation citoyenne ;
- Au niveau territorial, s’appuyer sur les cadres de gouvernance existants (emploi/formation, cohésion sociale/pauvreté, mobilité, ruralité) en ruralité pour favoriser la prise en compte systémique des besoins des jeunes ruraux et amplifier les ressources d’ingénierie dédiées aux territoires ruraux.
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