Questions-réponses | Le suivi de l’état de santé des salariés ayant une pluralité d’employeurs

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Questions-réponses : le suivi de l’état de santé des salariés ayant une pluralité d’employeurs

Les employeurs sont responsables chacun en ce qui les concernent du suivi de l’état de santé de leurs travailleurs quand bien même le suivi de l’état de santé de ces derniers est mutualisé dans le cadre des dispositions du présent décret.

Identification de la situation de pluri-emplois

L’identification des situations de pluri-emplois doit être réalisée par le service de prévention et de santé au travail interentreprise (SPSTI ) de l’employeur principal (cf. définition infra question 6). À ce titre, le SPSTI de l’employeur principal doit tenir compte des informations disponibles au sein de son SPSTI ainsi que celles des autres SPSTI en cas d’adhésion auprès de services différents.

En complément, et afin de faciliter l’identification d’une éventuelle situation de pluri-emplois, l’employeur peut demander à son salarié les informations suivantes :

  • Le nom de ses autres employeurs et un contact,
  • Le type d’emploi occupé. La demande peut se faire par tout moyen.Ces informations sont ensuite transmises au SPSTI auquel l’employeur adhère qui les communique, le cas échéant, aux SPSTI des autres employeurs, en recueillant des informations auprès du salarié si besoin.

Il appartient à l’employeur de s’assurer, dès l’embauche, du respect de l’exigence de mise en œuvre de la mutualisation du suivi de l’état de santé, y compris en demandant au travailleur de l’informer de la conclusion d’autres contrats de travail. Dans ce cas, le travailleur a l’obligation d’informer son employeur de la conclusion d’autres contrats de travail.

La notion de simultanéité des contrats doit se distinguer de la notion de « contrats successifs ». La simultanéité se matérialise par la conclusion à un instant T de plusieurs contrats de travail. A contrario, dans le cadre de contrats de travail successifs, ces derniers se succèdent les uns après les autres sans être concomitants.

Dans le cadre du suivi de l’état de santé du travailleur, les modalités de ses conditions de travail ainsi que les risques inhérents à son poste de travail vont déterminer le type de suivi dont il doit bénéficier (L. 4624-1 et L. 4624-2 du code du travail). Le code du travail prévoit en effet des modalités de réalisation particulières de la visite pour chaque type de suivi :

  • Le travailleur soumis au suivi individuel de l’état de santé de droit commun doit bénéficier d’une visite d’information et de prévention (VIP) dans les trois mois de sa prise de poste ;
  • Le travailleur en suivi adapté doit bénéficier d’un suivi intermédiaire entre un suivi simple et un suivi renforcé ;
  • Enfin le travailleur en suivi renforcé bénéficie d’un examen médical d’aptitude préalablement à l’affectation au poste, effectué par le médecin du travail et d’un suivi individuel de l’état de santé plus fréquent.

À cet effet, pour que le SPSTI de l’employeur puisse caractériser la situation de pluri-emplois, le type de suivi doit être identique quel que soit le poste occupé par le travailleur chez ses différents employeurs.

Par exemple : un travailleur bénéficie d’un suivi individuel de l’état de santé de droit commun (VIP) chez un employeur A. Ce même travailleur bénéficie d’un suivi adapté chez un autre employeur B car il travaille de nuit. Le suivi de l’état de santé du travailleur n’est, par conséquent, pas identique pour tous les postes qu’il occupe et ne peut faire l’objet d’une mutualisation.

En revanche, un travailleur de nuit qui passe une VIP avant l’affectation sur son poste aura un suivi de même nature que la femme enceinte qui passe une VIP dans un délai qui ne peut excéder 3 mois à compter de la prise effective du poste car tous les deux bénéficient du même type de suivi, le suivi adapté.

Il appartient donc au SPSTI de l’employeur principal de déterminer si le suivi est de même nature.

Le niveau de détail de la nomenclature PCS ESE se limitera aux trois premiers chiffres suivis d’une lettre.

L’employeur principal est celui avec qui la date de conclusion du contrat de travail est la plus ancienne, y compris lorsque ce contrat de travail a été transféré par transfert légal ou conventionnel.

Dans ce cas, l’employeur principal est celui chez qui la durée de travail contractuelle est la plus importante.

L’employeur principal est identifié au regard de l’ancienneté de la relation contractuelle, il ne peut pas se désister au profit d’un autre employeur sur la base d’un autre critère.

Pour l’année en cours, le suivi individuel de l’état de santé est assuré par le SPSTI qui a été identifié préalablement pour mettre en œuvre la mutualisation. Le suivi individuel de l’état de santé sera transféré par l’ancien SPSTI en charge du suivi, au SPSTI du nouvel employeur principal en début de nouvelle année qui en informera le salarié et chacun de ses employeurs.

Mise en œuvre de la mutualisation du suivi individuel de l'état de santé

Le SPSTI de l’employeur principal est tenu d’informer individuellement chaque employeur concerné de l’ensemble des étapes du suivi (convocation, visite, avis rendu, etc.) par tous moyens (courrier, email, dépôt dans l’espace employeur…).

Les visites doivent avoir lieu prioritairement sur le temps de travail du travailleur. La programmation de la visite est réalisée par le SPSTI de l’employeur principal, sans cibler spécifiquement les heures de travail réalisées chez cet employeur principal.

Oui, car le suivi individuel de l’état de santé mutualisé est réalisé pour le compte de tous les employeurs, donc chacun peut mettre en demeure le travailleur de s’y soumettre et, le cas échéant, le sanctionner.

Si l’employeur à qui doit incomber l’organisation d’une visite ne le fait pas, l’autre employeur peut demander au SPSTI de l’employeur principal l’organisation de cette visite.

Le suivi individuel de l’état de santé mutualisé est réalisé pour le compte de tous les employeurs. Ainsi, dans l’exemple ci-dessus, le travailleur n’a pas à passer de nouvelle visite d’embauche en juillet dès lors que tous les employeurs disposent de l’avis rendu en janvier. Le renouvellement de cette visite devra avoir lieu au plus tard en janvier, de l'année + 4.

Par ailleurs, une visite intermédiaire doit être effectuée par un professionnel de santé du SPSTI de l’employeur principal, au plus tard en janvier de l'année + 2, conformément aux dispositions prévues à l’article R. 4624-28 du code du travail.

Par exemple, comment traiter le cas d'un salarié qui, à l’issue d’un arrêt de travail ne se rend pas à la visite de reprise organisée par l’employeur ?

L’obligation d’organiser une visite de reprise pèse sur l’employeur dès que le salarié manifeste son intention de reprendre le travail.

Lorsque l’employeur a invité le salarié à se présenter dans l’entreprise pour sa visite de reprise mais que ce dernier refuse de s’y soumettre, l’employeur peut considérer que ce refus est un manquement de son salarié à ses obligations contractuelles et user de son pouvoir disciplinaire en prenant une sanction. De plus, en cas de demande réitérée de l’employeur à son salarié de se présenter à la visite de reprise, sans que le salarié ne s’y présente, la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation estime que l’employeur peut prononcer le licenciement de son salarié pour faute grave.

La décision de sanctionner son salarié, voire de le licencier relève du pouvoir disciplinaire de l’employeur. En cas de pluralité d’employeurs, chacun d’eux évaluera les conséquences du refus du salarié de se présenter à la visite de reprise et déterminera si une sanction doit être prononcée à l’encontre de son salarié et, si l’employeur estime que le manquement du salarié est caractérisé, la graduation de cette sanction. Autrement dit, aucune automaticité n’existe entre la décision pouvant sanctionner un salarié qui serait prise par un employeur et la décision des autres employeurs du salarié de prendre ou non une sanction : si l’employeur responsable d’organiser la visite de reprise décide de licencier son salarié pour faute, les autres employeurs sont libres de déterminer eux-mêmes si une sanction doit être prise à l’encontre de ce salarié.

 

Financement

Le SPSTI de l’employeur principal recouvre la cotisation annuelle prévue à l’article L. 4622-6 du code du travail auprès de chaque employeur, en la divisant entre l’ensemble des employeurs à parts égales.

Exemple : cotisation à 90 euros avec 3 employeurs = 90/3= 30 €.

À cet effet, le SPSTI se fonde sur l’établissement d’une photographie annuelle des contrats de travail exécutés simultanément qui se basera sur la déclaration des effectifs transmise avant le 28 février de l’année en cours par les employeurs concernés et qui permettra d’identifier les situations de pluri-emplois existantes au plus tard au 31 janvier de l’année.

Lorsqu’en cours d’année, une nouvelle situation de pluri-emploi est portée à la connaissance et identifiée par le SPSTI de l’employeur principal, celui-ci ne procède pas à l’appel d’une ou plusieurs cotisations complémentaires.

Dans le cadre des associations loi 1901, le montant de ces frais d’adhésion est dépendant des statuts ou du règlement intérieur du SPSTI de l’employeur principal auquel l’entreprise adhère.

Il est recommandé aux SPSTI de prendre en compte la situation des employeurs concernés par des travailleurs en pluri-emploi lors de leur adhésion pour limiter leurs frais d’adhésion.

Dispositions transitoires

Pour l’année 2023, lorsque les employeurs relèvent d’un même SPSTI, les situations de pluri-emplois devront être identifiées par le SPSTI de l’employeur principal au plus tard à la date du 31 juillet 2023 afin que les cotisations puissent être partagées à part égales entre les employeurs.

Pour les employeurs relevant d’un même SPSTI, les cotisations facturées au titre de l’année 2023 pourront faire l’objet d’un avoir pour l’année 2024 lorsque des situations de pluri-emplois auront été identifiées au plus tard au 31 juillet 2023.

Autres

Non, le décret ne s’applique pas aux particuliers employeurs. Le législateur a prévu un suivi individuel de l’état de santé distinct pour ces derniers. Le code du travail renvoie à l’accord collectif de branche le soin de prévoir les règles relatives à l’organisation et au choix du service de prévention et de santé au travail ainsi qu’aux modalités de surveillance de l’état de santé de ces travailleurs

Non, le décret ne s’applique pas aux SPSTA car un employeur disposant d’un SPSTA ne peut pas adhérer à un SPSTI.

L’article 25 de la loi n°2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail précise « qu’en cas de pluralité d’employeurs, le suivi de l’état de santé des travailleurs occupant des emplois identiques est mutualisé suivant des modalités définies par décret. ». Le périmètre du cadre réglementaire se limite donc au suivi de l’état de santé du salarié concerné par une situation de pluri-emploi.

Dès lors que les conditions de pluri-emplois sont réunies, la mutualisation du suivi de l’état de santé est obligatoire. Le consentement du salarié n’a pas à être recueilli.

Les entreprises ayant déjà payé leur cotisation pour l’année 2023 n’auront pas d’obligation d’adhérer au SPSTI de l’employeur principal pour l’année 2023 lorsqu’elles adhèrent à des SPSTI différents. Néanmoins, ces entreprises devront adhérer dès le début de l’année 2024 pour engager la mutualisation du suivi.