TRA4 - Bulletin Officiel N°2005-6: Annonce N°9




Direction générale de l’urbanisme, de l’habitat et de la construction
Habitat construction

Circulaire UHC/IUH 1 no 2005-32 du 11 mai 2005 relative
à la prévention des expulsions locatives
NOR :  SOCU0510869C

(Texte non paru au Journal officiel)

Textes sources :
        Loi no 98-657 du 29 juillet 1998 d’orientation relative à la lutte contre les exclusions ;
        Loi no 2000-1208 du 13 décembre 2000 solidarité et renouvellement urbains (SRU) ;
        Loi no 2005-32 du 18 janvier 2005 programmation pour la cohésion sociale
Le ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales ; le ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale ; le garde des sceaux, ministre de la justice à Madame et Messieurs les préfets de région ; Mesdames et Messieurs les préfets de département.
    La prévention des expulsions est un axe prioritaire de la politique du gouvernement dans la lutte contre les exclusions.
    La loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 s’inscrit dans cet objectif. La loi prévoit la possibilité de conclure un protocole entre les bailleurs sociaux et les occupants de bonne foi dont le bail a été résilié afin d’éviter l’expulsion. Ce protocole comporte des engagements réciproques permettant le maintien du bénéfice des aides personnelles au logement et la signature d’un nouveau bail lorsque l’occupant a respecté ses engagements.
    La loi renforce, par ailleurs, le dispositif législatif de prévention des expulsions déjà existant en introduisant deux nouveautés :
    Pour les organismes bailleurs dont les locataires bénéficient d’une aide personnelle au logement, la saisine de la section départementale des aides publiques au logement (SDAPL) présidée par le préfet ou de l’organisme payeur est, dorénavant, obligatoire sous peine d’irrecevabilité de la demande aux fins de constat de résiliation de bail.
    Le dispositif de prévention des expulsions, prévu à l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, est désormais applicable aux demandes reconventionnelles aux fins de constat ou de prononcé de la résiliation motivée par l’existence d’une dette locative : à ce titre, les bailleurs vous rendront destinataires de la copie de cette demande reconventionnelle.
    Au-delà de la mise en oeuvre de ces mesures, nous vous demandons de donner une nouvelle impulsion aux dispositifs existants.
    Il s’avère, en effet, que la loi du 29 juillet 1998 dont le fondement était de substituer à une logique d’ordre public une logique de prévention des expulsions locatives n’a pas donné totalement les résultats escomptés. Les bilans consacrés à l’analyse du dispositif de prévention des expulsions font apparaître que les différents systèmes d’aides financières peuvent encore être mieux articulés. Les SDAPL ont des difficultés, dans certains départements, à effectuer un traitement rapide et personnalisé des dossiers. Il arrive, trop souvent, que les FSL statuent après que le juge ait rendu sa décision. Les enquêtes sociales ne sont pas encore systématiques, notamment dans le parc privé, et leur contenu reste très hétérogène. Les éléments destinés au juge lui sont parfois transmis après l’audience. Les plans d’apurement mis en place par le juge sur une durée maximale de vingt-quatre mois prévue par la loi, connaissent un fort taux d’échec par insuffisance du suivi ou d’accompagnement des locataires après jugement et, parfois, en raison de l’importance de la dette. Enfin, l’absence de charte pour la prévention des expulsions dans certains départements met en évidence la mobilisation très inégale des acteurs de terrain concernés.
    Une hausse sensible des assignations, du nombre de décisions de justice autorisant l’expulsion pour dettes locatives et du nombre d’expulsions effectives démontrent la nécessité de renforcer le dispositif et d’en améliorer le fonctionnement.
    L’Etat, en tant que garant du droit au logement, se doit d’affirmer le caractère prioritaire de la politique de prévention des expulsions locatives qui doit constituer une action majeure du Plan départemental pour l’accès au logement des personnes défavorisées (PDALPD) dont vous continuerez à assurer le copilotage. Dans ce cadre, vous avez un rôle déterminant à jouer en tant que président de la SDAPL, de la commission de surendettement et par la faculté que la loi relative aux libertés et responsabilités locales du 13 août 2004 vous a donnée pour saisir directement le FSL d’une demande d’aide concernant une famille en impayé de loyer.
    A cet égard, si vous n’êtes plus coprésident du FSL, vous gardez néanmoins une mission de regard et de suivi sur les activités du FSL et sur l’adéquation de ses actions au regard des objectifs du PDALPD.
    Les chartes pour la prévention des expulsions, dont la mise en oeuvre effective relève de votre responsabilité et de celle du président du conseil général, doivent être l’expression d’une démarche volontariste de tous les acteurs, permettre une bonne articulation entre le travail social et la procédure judiciaire et comporter un dispositif de suivi. Les chartes doivent constituer le cadre d’une véritable définition de la stratégie départementale en matière de prévention des expulsions locatives.
    Vous êtes donc invités à promouvoir la signature de telles chartes, dans les départements qui n’en seraient pas encore dotés et à veiller à l’évolution des chartes déjà signées en fonction des résultats obtenus et de l’évaluation qui en sera faite par l’ensemble des signataires. Elles ont vocation à s’intégrer dans les futures chartes territoriales de cohésion sociale pour renforcer l’approche globale de la lutte contre les exclusions.
    Les chartes pour la prévention des expulsions ne doivent pas se réduire à un simple document formel. Elles doivent être signées notamment par les bailleurs publics et par les organisations représentatives des bailleurs privés, notamment les associations affiliées à l’Union nationale pour la propriété immobilière, le président du tribunal de grande instance du chef lieu du département en qualité de président du conseil départemental de l’accès au droit (CDAD), la chambre départementale des huissiers et celle de l’ordre des avocats ainsi que les maires des principales communes et, le cas échéant, les présidents des établissements publics de coopération intercommunale dotés de la compétence « Habitat ».
    Les CDAD doivent être pleinement associés à la prévention des expulsions locatives. Ces groupements d’intérêt public, institués dans un grand nombre de départements, en charge du pilotage au plan local de la politique de l’accès au droit, ont un rôle essentiel à jouer, en termes d’identification des besoins et de mise en place de dispositifs d’information adaptés. Ils présentent, en outre, l’avantage de regrouper en leur sein tous les acteurs locaux impliqués évoqués ci-dessus.
    Par ailleurs, le réseau des associations départementales d’information sur le logement (ADIL) peut également apporter un appui significatif. Certaines d’entre elles, notamment dans le cadre d’une expérimentation lancée par le ministère chargé du logement (cf. note 1) , ont développé une action spécifique à travers l’animation de chartes départementales pour la prévention des expulsions, l’information juridique aux locataires en impayés, l’expertise de la dette et la mise en place d’actions de formation.
    Tous les constats font ressortir que l’élément clef du dispositif de prévention des expulsions est constitué par l’enquête sociale et, en particulier, dans le parc privé où les locataires peuvent être particulièrement fragilisés car moins suivis socialement. La réalisation de cette enquête sociale apparaît donc comme une condition essentielle de l’efficacité de la politique de prévention des expulsions.
    Cette enquête poursuit un double objectif :
    1.  Réaliser un diagnostic complet de la situation sociale et financière du locataire, préconiser des solutions, en particulier de règlement de la dette et mobiliser le locataire ;
    2.  Fournir au juge des éléments utiles pour lui permettre de prendre sa décision en toute connaissance de cause. A cet égard, vous veillerez à ce que les éléments de l’enquête sociale lui soient transmis dans les délais utiles.
    Il est clair que l’enquête sociale ne saurait se substituer à la présence du locataire à l’audience et à son assistance par un avocat. Il n’en demeure pas moins que sa qualité conditionne en grande partie l’issue de la procédure.
    Les chartes pour la prévention des expulsions devront prévoir les conditions de réalisation des enquêtes sociales et de leur répartition entre les différents organismes sociaux compétents et les associations spécialisées.
    Il est préférable de confier l’enquête sociale au travailleur social qui connaît déjà le locataire. Si les travailleurs sociaux de secteur ne peuvent assurer cette enquête, certaines CAF et CMSA, pour les ménages percevant des prestations sociales, ainsi que les centres communaux d’action sociale (CCAS) peuvent aussi en être chargés. Il est également possible de faire appel à des associations spécialisées pouvant être financées par le Fonds de Solidarité pour le Logement (FSL).
    Enfin, les chartes doivent définir une stratégie en matière d’accompagnement social.
    Sur l’ensemble de ces points vous travaillerez en étroite concertation avec le président du conseil général qui, à compter du 1er janvier 2005, est seul responsable du FSL, ce dernier restant, néanmoins, un levier financier déterminant pour la mise oeuvre du PDALPD.
    Dans le même esprit, toujours en liaison avec le président du conseil général, vous vous assurerez que les procédures d’urgence mises en place pour les aides du FSL seront bien utilisées pour la prévention des expulsions et que les locataires pour lesquels un relogement est envisagé sont pris en compte au titre des publics prioritaires du PDALPD à travers notamment le recours au contingent préfectoral et à la mise en oeuvre des engagements négociés dans le cadre des accords collectifs avec les bailleurs sociaux.

Le ministre de l’intérieur
de la sécurité intérieure
et des libertés locales,
Dominique  de Villepin

Le ministre de l’emploi, du travail
et de la cohésion sociale,
Jean-Louis  Borloo

Le garde des sceaux,
ministre de la justice,
Dominique  Perben

La ministre déléguée à l’intégration,
à l’égalité des chances
et à la lutte contre l’éxclusion,
Nelly  Olin

Le ministre délégué
au logement et à la ville,
Marc-Philippe  Daubresse

NOTE (S) :


(1) Cf. la circulaire du 10 mars 2003. Vous trouverez enfin, ci-joint, un document pédagogique sur la préventiondes expulsions. L’élaboration de ce document a été décidé lors du comité interministériel de lutte contre les exclusions (CILE) du 6 juillet 2004. Il est conçu comme un outil visant à donner des préconisations méthodologiques et techniques sur la base de recommandations et de bonnes pratiques qu’il convient d’encourager pour la réalisation des enquêtes sociales. Vous veillerez à assurer sa diffusion auprès de l’ensemble des travailleurs sociaux et des acteurs de terrain.