Bulletin Officiel du Travail, de lEmploi et de la Formation Professionnelle
No 2002/17 du vendredi 20 septembre 2002
LOI PORTANT CRÉATION DUN DISPOSITIF DE SOUTIEN
À LEMPLOI DES JEUNES EN ENTREPRISE
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Conseil constitutionnel, nous avons lhonneur de vous déférer, conformément au deuxième alinéa de larticle 61 de la Constitution, la loi portant création dun dispositif de soutien à lemploi des jeunes en entreprise telle quadoptée par le Parlement.
A lappui de cette saisine, nous développons les moyens et griefs qui suivent à lencontre de larticle 3 de la loi.
Sur larticle 3 de la loi
Larticle 3 de la loi critiquée complète par deux alinéas larticle L. 351-14 du code du travail et a pour objet de donner une base législative à laccord interprofessionnel du 19 juin 2002 dont lune des clauses consiste à instituer une contribution spécifique dassurance chômage destinée à financer le régime propre aux intermittents du spectacle, en la doublant pour la faire passer de 5,8 % à 11,6 %.
Cet article résulte dun amendement gouvernemental déposé au Sénat le 17 juillet 2002 au cours de la première lecture du texte pour lequel lurgence était déclarée.
Cet amendement savère avoir été adopté en méconnaissance du premier alinéa de larticle 39 de la Constitution et du premier alinéa de larticle 44, et ne peut quêtre censuré conformément à votre jurisprudence applicable aux adjonctions ou modifications sans lien avec le texte au cours de la discussion (pour une application récente : décision no 2000-436 DC du 7 décembre 2000).
En loccurrence, il est peu de dire que le lien est inexistant.
La loi porte sur le soutien à lemploi des jeunes en entreprises. Lamendement du Gouvernement déposé au Sénat sous le numéro 23, et devenu larticle 3 du texte, concerne donc le régime des cotisations ASSEDIC, patronales et salariales, de la catégorie des intermittents du spectacle.
Les dispositions de cet article nont aucun rapport avec lintitulé du texte et sont donc dépourvues de tout lien avec la loi.
Dailleurs, M. le ministre lui-même en a fait laveu au moment où il le défendait devant la Haute Assemblée : « Cet amendement, je limagine, a de quoi surprendre dans une discussion sur le dispositif de soutien à lemploi des jeunes en entreprises [...]. Quant au lien avec ce projet de loi, je reconnais quil est ténu. Permettez-moi seulement de relever que nous sommes bien dans le champ de la politique de lemploi et que les intermittents du spectacle sont aussi, souvent, des jeunes » (Sénat, Compte rendu analytique, séance du 17 juillet 2002).
A lAssemblée nationale, interpellé par au moins trois députés sur la nature de « cavalier » de larticle 3, M. le ministre na plus répondu, sétant aperçu, sans doute, depuis sa justification initiale que larticle na pas de rapport avec un texte sur lemploi des jeunes.
Labsence de lien avec le texte en discussion est évident et linvalidation au titre de la méconnaissance des articles 39 et 44 de la Constitution est inévitable.
(Liste des signataires visée dans la décision no 2002-459 DC.)