Bulletin Officiel du Travail, de l’Emploi et de la Formation Professionnelle
No 2002/2  du mardi 5 février 2002



Licenciement économique

Journal officiel du 18 janvier 2002

Saisine du Conseil constitutionnel en date du 20 décembre 2001 présentée par plus de soixante sénateurs, en application de l’article 61, alinéa 2, de la Constitution, et visée dans la décision no 2001-455 DC

NOR :  CSCL0101526X

LOI DE MODERNISATION SOCIALE

6.  L’article 107

    Cet article donne, à l’article L. 321-1 du code du travail, une nouvelle définition du licenciement pour motif économique qui utilise des termes insuffisamment précis ou sans portée normative de nature à susciter le doute chez les destinataires de la règle de droit et, par voie de conséquence, à attribuer des pouvoirs exorbitants aux autorités en charge de leur sanction.
    Ainsi, s’agissant de la notion de « difficultés économiques sérieuses n’ayant pu être surmontées par tout autre moyen », on offre au juge la possibilité de substituer son choix à celui de l’employeur (v. P.H. Antonmattéi, Dr. soc. 2001, p. 930).
    S’agissant de la notion de « nécessités de réorganisation indispensables à la sauvegarde de l’activité de l’entreprise », on peut penser qu’elle donnera lieu à un contentieux important tant la formule contient des notions vagues. Il sera bien difficile pour un employeur qui invoquera ce motif d’avoir, si ce n’est une certitude, au moins une idée précise du risque encouru, à savoir le paiement des indemnités liées au défaut de cause réelle et sérieuse.
    Cet article doit donc être déclaré contraire à la Constitution.

7.  L’article 108

    L’article 108 de la loi complète l’article L. 321-1 du code du travail par un alinéa qui débute ainsi : « le licenciement pour motif économique ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé sur un emploi... ». Les sénateurs soussignés se demandent si les représentants du personnel et les salariés concernés par le licenciement auront la possibilité de saisir en référé le juge pour obtenir une suspension de la procédure tant que l’employeur n’a pas correctement exécuté l’obligation de reclassement. De même si, après la mise en œuvre du licenciement, le juge estime que l’obligation de reclassement n’a pas été respectée, on ne connaît pas la sanction qui sera appliquée : défaut de cause réelle et sérieuse de licenciement comme la jurisprudence l’admet aujourd’hui ou nullité du licenciement puisque le « licenciement ne peut intervenir ». Une fois encore, le législateur n’a pas ici exercé pleinement sa compétence.
    Cet article doit donc être déclaré contraire à la Constitution.