La rupture conventionnelle du contrat de travail à durée indéterminée

Dans les conditions fixées par les articles L. 1237-11 à L. 1237-16 du Code du travail, l’employeur et le salarié peuvent convenir d’un commun accord des conditions de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée (CDI) qui les lie.

Cette rupture conventionnelle du contrat de travail à durée indéterminée obéit à une procédure spécifique : entretien(s) entre les deux parties, homologation de la convention. Elle est entourée d’un certain nombre de garanties pour le salarié et lui ouvre droit, dans les conditions de droit commun (activité préalable suffisante, recherche active d’emploi), au bénéfice de l’allocation d’assurance chômage.

À l’occasion de cette rupture conventionnelle, le salarié perçoit une « indemnité spécifique de rupture conventionnelle » dont le montant ne peut être inférieur au montant de l’indemnité légale de licenciement.

À savoir !
Les demandes d’homologation de ruptures conventionnelles doivent obligatoirement être télétransmises via le site TéléRC, sauf cas particuliers précisés ci-après

La rupture conventionnelle en vidéo (Web série droit du travail)

La rupture conventionnelle a été introduite dans le Code du travail avec la loi du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail. Les statistiques de la Dares indiquent qu’en 2021, 454  000 ruptures conventionnelles individuelles ont été homologuées dans le secteur privé en France métropolitaine.

Quelles sont les particularités de ce mode de rupture et comment se déroule la procédure en pratique ?

C’est ce que nous allons voir.

Bonjour, c’est Honorine et aujourd’hui, je vais vous présenter la rupture conventionnelle, un épisode d’une série consacrée au droit du travail.

La présentation du champ d’application de la rupture conventionnelle nous permettra de déterminer qui peut en bénéficier. Puis nous verrons quelle procédure doit être suivie avant d’envisager les conséquences d’une telle rupture.

C’est l’article L. 1237-11 du Code du travail qui introduit la possibilité pour un salarié et son employeur de rompre d’un commun accord le contrat de travail qui les lie. Précisons tout de suite que ce mode de rupture ne concerne pas tous les contrats de travail. En effet, les dispositions qui traitent de la rupture conventionnelle se trouvent dans la partie du Code du travail qui est consacrée à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée. Ainsi, la rupture conventionnelle ne concerne donc que les salariés et les employeurs liés par un contrat à durée indéterminée. Les titulaires d’un contrat à durée déterminée et les apprentis sont donc exclus de ce dispositif.

Notons également que le législateur a prévu des cas dans lesquels il n’est pas possible d’opter pour le dispositif de la rupture conventionnelle. C’est le cas lorsque la rupture d’un contrat de travail résulte d’un accord collectif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ou d’un plan de sauvegarde de l’emploi.

L’article L. 1237-11 du Code du travail indique, je cite : « La rupture conventionnelle exclusive du licenciement
ou de la démission ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties ». Ce mode de rupture du contrat de travail est singulier car il repose sur la volonté commune des parties de rompre le contrat de travail. En pratique, le salarié et l’employeur doivent se mettre d’accord sur les conditions de la rupture.

La Cour de cassation a été amenée à se prononcer notamment sur l’existence ou non d’un vice de consentement. Par exemple, la chambre sociale de la Cour de cassation, dans une décision du 23 janvier 2019 publiée au Bulletin, a estimé qu’en l’absence de vice du consentement établi, l’existence de faits de harcèlement moral n’affecte pas en elle-même la validité de la convention de rupture.

La liberté du consentement des parties est en principe garantie par le respect de la procédure prévue par le Code du travail. Ce sont les articles L. 1237-12 et suivants du Code du travail qui encadrent la procédure à suivre.

Au moins un entretien doit avoir lieu. Durant ce ou ces entretiens, le principe de la rupture est discuté. Au cours de ce ou de ces entretiens, le salarié peut se faire assister. Si le salarié fait ce choix, il doit en informer l’employeur auparavant. Ce dernier peut décider de se faire également assister et en informera le salarié.

Le Code du travail donne une liste limitative des personnes susceptibles d’assister le salarié. Cette personne peut être une personne qui appartient au personnel de l’entreprise, salarié titulaire d’un mandat syndical ou membre d’une institution représentative du personnel, mais s’il n’existe pas d’institutions représentatives du personnel au sein de l’entreprise, le salarié peut choisir d’être assisté par un conseiller du salarié présent sur une liste spécifique.

L’employeur, quant à lui, peut se faire assister par trois types de personnes : une personne de son choix appartenant à l’entreprise ou, si l’effectif de l’entreprise est inférieur à 50 salariés, par une personne appartenant à son organisation syndicale d’employeur ou bien encore par un autre employeur relevant de la même branche.

Le formalisme de la rupture est également encadré. Les parties remplissent et signent un document CERFA. Dans cette convention, il y a notamment le montant de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle. Ce montant est fixé par les parties mais ne peut pas être inférieur au montant de l’indemnité légale de licenciement ou au montant de l’indemnité conventionnelle si celle-ci est plus avantageuse.

Une fois signé par les deux parties, un exemplaire de cette convention est remis à chacune d’entre elles et un délai de quinze jours calendaires s’ouvre. Ce délai démarre le lendemain de la date de signature de la convention. Il est nommé délai de rétractation car durant ce temps, chacune des parties peut changer d’avis. La rétractation peut être exercée à tout moment durant ces quinze jours sous la forme d’une lettre attestant de sa date de réception par l’autre partie.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 14 février 2018 publié au Bulletin, a précisé qu’il importe peu
que la lettre soit réceptionnée après l’expiration du délai de quinze jours. Cependant, cette lettre doit être adressée à l’une des parties ayant signé le contrat de travail et non à un tiers tel que l’administration.

À l’issue de ce délai de quinze jours et si aucune des parties ne s’est rétractée, la convention de rupture doit être adressée à l’administration. Voyons dans un zoom en quoi consiste cette étape.

Après l’expiration du délai de rétractation, l’employeur ou le salarié adresse un exemplaire de la convention de rupture aux services départementaux de l’État en charge du travail. C’est ce que l’on appelle la demande d’homologation. Cette demande ne peut être faite avant l’expiration du délai de rétractation évoqué un peu plus tôt dans cette vidéo.

En pratique, et depuis le 1er avril 2022, cette demande est obligatoirement réalisée de manière dématérialisée via le site TéléRC.

À compter du lendemain de la date de réception de la demande par l’administration, un délai de quinze jours ouvrables s’ouvre durant lequel l’administration va instruire la demande. Si l’administration ne se prononce pas durant ce délai de quinze jours, l’homologation est réputée acquise. On dira alors que l’homologation est tacite ou implicite. Si l’administration refuse d’homologuer la convention de rupture, le contrat de travail ne sera pas rompu et continuera de s’exécuter dans les conditions habituelles.

Avant de clore ce zoom, précisons que si le salarié concerné est un salarié protégé, il ne s’agit pas d’une demande d’homologation, mais d’une demande d’autorisation. Cette demande doit être adressée à l’inspecteur du travail compétent qui dispose d’un délai de deux mois maximum pour se prononcer. Si l’inspecteur du travail reste silencieux, la demande d’autorisation est considérée rejetée.

Nous comprenons donc que ce n’est qu’à l’issue de ces deux délais successifs, le délai de rétractation et le délai d’instruction de la demande par les services de l’État, que le contrat de travail peut être rompu.

Ainsi, la date de fin du contrat de travail inscrite sur la convention de rupture ne peut pas intervenir avant le lendemain du jour de l’homologation ou de l’autorisation. Lorsque la rupture conventionnelle est homologuée ou autorisée, le contrat prend fin à la date inscrite sur la convention qui a été convenue entre les deux parties. Cette date peut être plus ou moins éloignée de la date minimale à laquelle les parties auront la certitude que l’homologation ou la demande d’autorisation n’ont pas été refusées.

Notons qu’il n’est pas prévu qu’un préavis soit effectué. Ce terme est réservé au licenciement ou à la démission.

L’employeur doit remettre aux salariés les documents dits de fin de contrat. Il s’agit du certificat de travail, de l’attestation Pôle emploi, du solde de tout compte ainsi que les documents relatifs aux dispositifs de participation, d’intéressement et plans d’épargne salariale au sein de l’entreprise.

D’un point de vue financier, le salarié perçoit l’indemnité de rupture dont le montant est inscrit dans la convention. En plus, il bénéficiera de l’indemnité des congés payés s’il n’a pas pris tous les congés acquis à la date de rupture du contrat. Si le contrat de travail prévoit une clause de non-concurrence, la contrepartie financière est due.

Le salarié a droit aux allocations chômage s’il remplit les conditions permettant d’en bénéficier.

Avant de conclure cet épisode, quelques mots sur les voies de recours. C’est le conseil de prud’hommes qui est compétent pour connaître des litiges concernant la convention, l’homologation ou le refus d’homologation. Il faut toutefois noter une particularité. La contestation de la rupture conventionnelle d’un salarié protégé s’exerce devant le ministère du Travail en cas de recours hiérarchique ou devant le tribunal administratif en cas de recours contentieux.

Nous arrivons au terme de cette vidéo et il y a donc trois points à retenir. Tout d’abord, la rupture conventionnelle ne concerne que les salariés en CDI. Ensuite, la procédure est encadrée par des délais, le délai de rétractation et le délai d’instruction de la demande d’homologation ou d’autorisation. Enfin, les conditions de rupture sont formalisées dans un document CERFA signé par les deux parties.

La rupture conventionnelle a été introduite dans le Code du travail avec la loi du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail. Les statistiques de la Dares indiquent qu’en 2021, 454  000 ruptures conventionnelles individuelles ont été homologuées dans le secteur privé en France métropolitaine.

Cet épisode présente les particularités de ce mode de rupture et comment se déroule la procédure en pratique. Avec un éclairage de Rose Ventura, contrôleuse du travail.

En quoi consiste la rupture conventionnelle ?

La rupture conventionnelle est une procédure qui permet à l’employeur et au salarié de convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. Elle n’est possible que pour les contrats de travail à durée indéterminée (CDI).

La rupture conventionnelle est exclusive du licenciement ou de la démission ; elle ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties.

Cette rupture résulte d’une convention signée par les parties au contrat, c’est-à-dire l’employeur et le salarié ; cette convention est soumise aux dispositions impératives fixées par le Code du travail (voir ci-dessous), destinées à garantir la liberté du consentement des parties.

  • Selon la Cour de cassation, l’existence d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture conventionnelle conclue en application de l’article L. 1237-11 du code du travail (arrêt du 30 septembre 2013).
  • Selon la Cour de cassation, en l’absence de vice du consentement (erreur, violence physique ou morale, tromperie ou « dol »), l’existence de faits de harcèlement moral n’affecte pas en elle-même la validité de la rupture conventionnelle (voir en ce sens, l’arrêt du 23 janvier 2019). A contrario, si à la date de la signature de la convention de rupture conventionnelle, le salarié était dans une situation de violence morale en raison du harcèlement moral et des troubles psychologiques qui en sont découlés, le vice du consentement est caractérisé, entrainant la nullité de la convention de rupture (voir en ce sens, l’arrêt de la Cour de cassation du 29 janvier 2020).
  • C’est à la partie (employeur ou salarié) qui invoque l’existence d’un vice du consentement de nature à justifier l’annulation de la rupture conventionnelle d’en rapporter la preuve ; sur ce point, on peut se reporter à l’arrêt de la Cour de cassation du 11 mai 2022.
  • Sauf dispositions légales contraires (voir notamment ci-dessous), la rupture du contrat de travail à durée indéterminée par accord des parties ne peut intervenir que dans le cadre de la rupture conventionnelle homologuée, dans la mesure où ce dispositif garantit la liberté du consentement des parties. Dès lors, la rupture du contrat de travail par accord des parties qui intervient en dehors de ce cadre, doit s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ouvrant droit, pour le salarié, aux indemnités prévues dans ce cas (arrêt de la Cour de cassation du 15 octobre 2014).

La rupture conventionnelle n’est pas applicable aux ruptures de contrats de travail résultant :
 

  • Des accords issus de la négociation menée, dans le cadre prévu par les articles L. 2242-20 et L. 2242-21 du code du travail, sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ;
  • Des plans de sauvegarde de l’emploi (PSE) dans les conditions définies par l’article L. 1233-61 du Code du travail ;
  • Des accords collectifs mentionnés à l’article L. 1237-17 du code du travail (accord collectif portant gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ou rupture conventionnelle collective).

Dépourvue de motif autre que la commune volonté des parties de rompre le contrat, une rupture conventionnelle peut intervenir alors même que l’entreprise rencontre des difficultés économiques qui l’amènent à se séparer de certains de ses salariés.

Pour autant, elle ne peut être utilisée comme un moyen de contourner les règles du licenciement économique collectif et donc de priver, de ce fait, les salariés des garanties attachées aux accords de collectifs mentionnés ci-dessus et aux PSE Ainsi, il convient que le salarié soit préalablement dûment informé de ces droits afin qu’il puisse, en toute connaissance de cause, opter ou non pour une rupture conventionnelle en cas de suppression de poste et si les garanties attachées au licenciement économique se révèlent plus avantageuses pour lui.

En ce sens, on peut se reporter à l’arrêt de la Cour de cassation du 6 janvier 2021.

On rappelle, en effet, que, dans le cadre d’un licenciement pour motif économique, le salarié bénéficie notamment des garanties suivantes :

1. Dans les entreprises ou groupes non soumis à l’obligation de proposer un congé de reclassement (entreprises ou groupes de moins de 1000 salariés et entreprises en redressement ou liquidation judiciaire)

L’employeur doit proposer le contrat de sécurisation professionnelle avec :
 

  • Une allocation correspondant à 75 % de son salaire journalier de référence, versée à compter du lendemain de la rupture du contrat de travail (sans préavis) et pendant 12 mois maximum,
  • Un entretien individuel de pré-bilan pour identifier le profil et le projet de reclassement de l’intéressé et un plan de sécurisation professionnelle qui comprend notamment :
     
    • si nécessaire, un bilan de compétences ;
    • un suivi individuel de l’intéressé par l’intermédiaire d’un référent spécifique, destiné à l’accompagner à tous les niveaux de son projet professionnel et à évaluer le bon déroulement de son plan de sécurisation, y compris dans les 6 mois suivant son reclassement ;
    • des mesures d’accompagnement (préparation aux entretiens d’embauche, techniques de recherche d’emploi…) et d’orientation professionnelle,
    • des actions de validation des acquis de l’expérience et des mesures de formation,
    • la possibilité de bénéficier, dans certaines circonstances, d’une indemnité différentielle de reclassement.

2. Dans les entreprises ou groupes de 1000 salariés et plus

L’employeur doit proposer un congé de reclassement. Il devra, dans ce cadre, verser une allocation s’élevant à 65% du salaire brut de référence (sans être inférieure à 85% du SMIC) pendant la durée du congé qui excède le préavis.

Quelle est la procédure ?

L’employeur et le salarié conviennent du principe d’une rupture conventionnelle lors d’un ou plusieurs entretiens.

Le défaut du ou des entretiens prévus par l’article L. 1237-12 du Code du travail relatifs à la conclusion d’une convention de rupture entraîne la nullité de la convention. C’est à la partie (salarié ou employeur) qui invoque cette cause de nullité d’en établir l’existence.

Au cours de cet entretien (ou de ces entretiens), le salarié peut se faire assister :
 

  • Soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise, qu’il s’agisse d’un salarié titulaire d’un mandat syndical ou d’un salarié membre de la délégation du personnel au comité social et économique (CSE), ou tout autre salarié ;
  • Soit, en l’absence d’institution représentative du personnel dans l’entreprise, par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative. Cette liste est consultable auprès de la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS) - précisément dans chaque section d’inspection du travail, et dans chaque mairie.

Si le salarié choisit se faire assister dans les conditions précisées ci-dessus, il doit en informer l’employeur avant la date prévue pour le ou les entretiens. L’employeur peut alors lui-même se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ou, dans les entreprises de moins de 50 salariés, par une personne appartenant à son organisation syndicale d’employeurs ou par un autre employeur relevant de la même branche.

  • L’employeur qui souhaite se faire assister doit également en informer le salarié, avant la date fixée pour le ou les entretiens.
  • La liste des personnes susceptibles d’assister le salarié ou l’employeur est limitative ; aucune autre, par exemple un avocat, ne peut donc assister à ces entretiens.

Quel est le contenu de la convention ?

La convention de rupture élaborée entre l’employeur et le salarié définit les conditions de cette rupture, notamment le montant de « l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle » qui sera versée au salarié. Ce montant ne peut pas être inférieur à celui de l’indemnité légale de licenciement prévue à l’article L. 1234-9 du Code du travail (voir précisions ci-dessous).

Cette convention fixe également la date de rupture du contrat de travail, qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l’homologation de la convention par l’autorité administrative (pour les salariés protégés, voir ci-dessous). Sous cette réserve, les parties sont libres de fixer, à leur convenance, la date de la fin du contrat de travail.

Un exemplaire de la convention doit être remis à chacune des parties, employeur et salarié, sous peine de nullité de la rupture (arrêt de la Cour de cassation du 6 février 2013).

L’exemplaire qui revient au salarié doit, en outre, lui être remis directement (et pas à un tiers), afin de garantir son libre consentement en lui permettant d’exercer ensuite son droit de rétractation en connaissance de cause (arrêt de la Cour de cassation du 7 mars 2018).

Sauf accord express des parties, le contrat de travail continue de s’exécuter normalement pendant tout le temps que dure la procédure d’élaboration et d’homologation de la convention, et jusqu’à la date fixée pour sa rupture.

Peut-on se rétracter ?

Afin d’éviter les décisions trop hâtives, et afin de permettre à chaque partie de mesurer la portée de sa décision, la loi :
 

  • Impose un délai minimum entre la signature de la convention et sa transmission à l’autorité administrative pour homologation ou, s’il s’agit d’un salarié protégé, pour autorisation - (cette transmission s’effectue via le site TéléRc, sauf si la rupture conventionnelle concerne un salarié protégé - voir ci-après) ;
  • Et permet à chaque partie de revenir sur sa décision durant ce délai (ce que l’on appelle « droit de rétractation »).

Ainsi, à compter de la date de signature de la convention par l’employeur et le salarié, l’un et l’autre dispose d’un délai de 15 jours calendaires (tous les jours de la semaine sont comptabilisés -voir précisions ci-dessous-) pour exercer ce droit de rétractation. Celui-ci est exercé sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l’autre partie. Pour se prémunir de toute difficulté, la partie qui souhaite se rétracter a intérêt de le faire par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par lettre remise à l’autre partie en main propre contre décharge mentionnant la date de remise.

  • Le délai de rétractation mentionné ci-dessus démarre au lendemain de la signature de la convention de rupture. Par application de l’article R 1231-1 du code du travail, si ce délai expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.
    La loi n’impose pas à la partie qui décide de se rétracter de motiver sa décision.
  • Sur le site « TéléRc », il est possible de simuler les dates des différentes étapes de la procédure.

En quoi consiste l’homologation de la convention ?

À l’issue du délai de rétractation mentionné ci-dessus, la partie la plus diligente (employeur – ou tiers mandaté, par exemple l’expert-comptable de l’employeur – ou salarié) adresse une demande d’homologation à l’autorité administrative compétente (c’est-à-dire le directeur régional de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités), avec un exemplaire de la convention de rupture. Sauf lorsqu’il s’agit d’un salarié protégé (voir ci-après), cette demande d’homologation doit obligatoirement être effectuée à partir du site « Télé RC ». Concrètement, à l’issue de la saisie sur ce portail des informations relatives à la rupture, y compris les éléments constitutifs de la convention de rupture (par exemple, le montant de l’indemnité qui sera versée au salarié), trois exemplaires du formulaire d’homologation sont imprimés : un pour l’employeur, un pour le salarié, un destiné à l’administration pour homologation. Chacun de ces exemplaires doit être signé par l’employeur et le salarié. A l’expiration des 15 jours du délai de rétractation, un exemplaire original, après avoir été scanné au format Pdf, est transmis pour homologation via le site « Télé RC » ; pour plus de précisions sur l’utilisation de ce service, on peut se reporter à la « visite guidée » proposée sur ce site.

  • La procédure d’homologation de la convention de rupture ne concerne pas les salariés protégés, qui relèvent de dispositions spécifiques (voir ci-après).
  • Le recours obligatoire au téléservice « Télé RC », (sauf pour les salariés protégés, voir ci-après) offre aux deux parties (employeur et salarié) une garantie de qualité de remplissage du dossier et un traitement rapide de la demande d’homologation.
  • Toutefois, lorsqu’une partie indique à l’autorité administrative compétente ne pas être en mesure d’utiliser ce téléservice, elle peut effectuer sa démarche par le dépôt d’un formulaire auprès de cette autorité (renseignements auprès de la DREETS compétente).

L’autorité administrative dispose d’un délai d’instruction de 15 jours ouvrables (c’est à dire que sont exclus les dimanches et les jours fériés- voir précisions ci-dessous), à compter de la réception de la demande, pour s’assurer du respect de la liberté de consentement des parties et des conditions prévues par le Code du travail : respect des règles relatives à l’assistance des parties, au droit de rétractation, au montant minimal de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle.

Le délai d’instruction de la demande par le directeur régional de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités démarre le lendemain de la réception de la demande. Par application de l’article R. 1231-1 du code du travail, si ce délai expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.

A défaut de notification dans ce délai, l’homologation est réputée acquise (il s’agira donc d’une homologation « tacite » ou « implicite ») et l’autorité administrative est dessaisie.

La validité de la convention est subordonnée à son homologation ; en d’autres termes, la convention n’aura aucune validité et ne sera donc d’aucun effet sur le contrat de travail qui continuera alors de s’exécuter dans les conditions habituelles :
 

  • Si l’homologation est refusée par l’autorité administrative dans le délai de 15 jours ouvrables mentionné ci-dessus dans ce cas, l’une ou l’autre des parties (ou les deux) peut former un recours contre ce refus d’homologation (voir ci-dessous) ;
  • Si l’autorité administrative n’est saisie par aucune des parties de la demande d’homologation de la convention.

Aucun « préavis » n’est prévu dans le cadre de la rupture conventionnelle du contrat de travail à durée indéterminée, ce terme étant réservé au licenciement et à la démission. Toutefois, rien n’empêche les parties de prévoir une date de rupture de contrat de travail qui convienne à chacun, et qui sera plus ou moins éloignée de la date minimale qu’est la certitude que l’homologation n’a pas été refusée par le directeur régional de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités.

S’agissant de la situation juridique du salarié pendant la procédure - c’est à dire tant que la date de rupture du contrat de travail n’a pas été atteinte -, les règles afférentes au contrat de travail continuent à s’appliquer (le salarié peut ainsi, par exemple, être en congés payés). La situation du salarié doit correspondre exactement aux modalités habituelles d’exercice du contrat de travail, droits et obligations de chaque partie comprises ; en particulier, le salarié doit être rémunéré normalement pendant cette période.

Les salariés « protégés » sont-ils concernés ?

La rupture conventionnelle peut s’appliquer aux salariés protégés (délégués syndicaux, membre élu du comité social et économique, etc.) dont la liste est donnée par les articles L. 2411-1 et L. 2411-2 du Code du travail. Elle peut également s’appliquer aux médecins du travail (voir précisions ci-dessous).

Toutefois, dans ce cas, et par dérogation aux dispositions précédemment exposées :
 

  • La rupture conventionnelle est soumise à l’autorisation de l’inspecteur du travail (et non à homologation) dans les conditions de droit commun prévues par le Code du travail pour chacun de ces salariés. La demande d’autorisation, accompagnée d’un exemplaire de la convention, doit être adressée à l’inspecteur du travail au moyen du formulaire Cerfa n° 14599*01 dont le modèle a été fixé par l’arrêté du 8 février 2012 (JO du 17) cité en référence ; cette demande d’autorisation ne peut être transmise à l’inspecteur du travail qu’à l’issue du délai de 15 jours calendaires prévu pour l’exercice du droit de rétractation (voir ci-dessus) ; pour de plus amples précisions, on peut se reporter à la Circulaire DGT n° 2008-11 du 22 juillet 2008 citée en référence ;
  • La rupture du contrat de travail ne peut intervenir que le lendemain du jour de l’autorisation donnée par l’inspecteur du travail, lequel dispose pour instruire la demande du délai de droit commun de l’autorisation qui peut être prolongé jusqu’à deux mois ; la date convenue de rupture du contrat de travail doit donc être fixée en conséquence, l’utilisation du site « Télé RC » n’est pas possible.
  • Le formulaire de rupture conventionnelle du CDI d’un salarié protégé contient en sa partie « 3 » la convention de rupture. Il est « autosuffisant » et aucun document complémentaire ne peut et ne doit être exigé. Si les parties le souhaitent, ce formulaire peut être éventuellement complété par des feuillets annexes présentant soit une convention de rupture ad hoc, soit explicitant les points d’accord de volonté des parties dans le cadre de la rupture. Un formulaire accompagné d’une convention de rupture portant identités et signatures des parties est également recevable
  • Pour les médecins du travail, la rupture conventionnelle est soumise à l’autorisation de l’inspecteur du travail, après avis du médecin inspecteur du travail. La procédure d’autorisation applicable à cette rupture conventionnelle est celle spécifiquement prévue par les articles R. 4623-18 à R. 4623-24 du code du travail).

Un recours juridictionnel est-il possible ?

Le conseil de prud’hommes est seul compétent pour connaître des litiges concernant la convention, l’homologation ou le refus d’homologation. Tout autre recours contentieux ou administratif est exclu (sauf pour les salariés protégés dans le cadre de l’autorisation de rupture conventionnelle).

Le recours juridictionnel devant le conseil de prud’hommes doit être formé, à peine d’irrecevabilité, avant l’expiration d’un délai de 12 mois à compter de la date d’homologation de la convention.

L’homologation ne peut faire l’objet d’un litige distinct de celui relatif à la convention.

Les avocats salariés titulaires d’un contrat de travail, doivent présenter leur demande d’homologation devant le DREETS – DDETS de leur territoire compétent. Toutefois, en cas de contentieux, c’est devant le Bâtonnier que le litige doit être porté.

Quelles sont les indemnités dues au salarié ?

Indemnité spécifique de rupture conventionnelle

À l’occasion de la rupture conventionnelle de son contrat de travail, le salarié doit percevoir une « indemnité spécifique de rupture conventionnelle » dont le montant, négocié avec l’employeur et précisé dans la convention de rupture, ne peut être inférieur au montant de l’indemnité légale de licenciement.

Comme le précise la Cour de cassation dans un arrêt du 11 mai 2022 auquel on se reportera, « la créance d’indemnité de rupture conventionnelle, si elle n’est exigible qu’à la date fixée par la rupture, naît dès l’homologation de la convention ». Ainsi, dans l’hypothèse où le salarié décède après l’homologation de la convention de rupture, l’employeur doit verser l’indemnité de rupture aux héritiers du salarié.

Aucune condition d’ancienneté n’est requise pour avoir droit à cette indemnité ; toutefois, si le salarié partie à la rupture conventionnelle a moins de 8 mois d’ancienneté dans l’entreprise (ancienneté requise pour avoir droit à l’indemnité légale de licenciement), l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle lui est due au prorata du nombre de mois de présence.

Aux termes de l’avenant n° 4 du 18 mai 2009 à l’accord national interprofessionnel (ANI) sur la modernisation du marché du travail du 11 janvier 2008, l’indemnité spécifique de rupture à verser au salarié dont le CDI a été rompu dans le cadre d’une rupture conventionnelle de l’article L. 1237-11 du Code du travail, doit être au moins égale à l’indemnité conventionnelle de licenciement, dès lors que cette dernière s’avère plus favorable, pour le salarié, que l’indemnité légale.

Cet avenant ne s’est d’abord imposé qu’aux employeurs adhérents du MEDEF, de la CGPME ou de l’UPA, et ce au titre des conventions de rupture conventionnelle conclues depuis le 18 mai 2009. Son extension par l’arrêté du 26 novembre 2009 (JO du 27 novembre) le rend désormais obligatoire à l’égard de tous les employeurs entrant dans le champ d’application de l’ANI du 11 janvier 2008 (c’est-à-dire les employeurs du secteur privé, exception faite, notamment, des professions libérales, du secteur associatif et des employeurs de salariés agricoles), et ce au titre des conventions de rupture conclues depuis le 28 novembre 2009. Les conventions conclues précédemment ne sont pas remises en cause.

La rupture conventionnelle est également ouverte aux salariés du particulier employeur, titulaires d’un contrat de travail à durée indéterminée. Dans ce cas, l’indemnité de rupture conventionnelle doit être au moins égale à l’indemnité légale de licenciement.

A contrario, la rupture conventionnelle n’est pas ouverte aux assistants maternels, conformément à la volonté des partenaires sociaux confirmée par la nouvelle convention collective nationale des particuliers employeurs et de l’emploi à domicile du 15 mars 2021.

Régime fiscal et social

N’est pas soumise à l’impôt sur le revenu, la fraction de l’indemnité spécifique versée à l’occasion de la rupture conventionnelle du contrat de travail d’un salarié lorsqu’il n’est pas en droit de bénéficier d’une pension de retraite d’un régime légalement obligatoire, qui n’excède pas :
 

  • Soit deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédant la rupture de son contrat de travail, ou 50 % du montant de l’indemnité si ce seuil est supérieur, dans la limite de 6 fois le plafond annuel de la sécurité sociale (PASS) en vigueur à la date de versement des indemnités ;
  • Soit le montant de l’indemnité de licenciement prévue par la convention collective de branche, par l’accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi.

Lorsque le salarié est susceptible de bénéficier d’une pension de retraite d’un régime légalement obligatoire, l’indemnité de rupture conventionnelle est assujettie à l’impôt sur le revenu dès le premier euro.

Sur le régime social de cette indemnité (cotisations sociales, CSG, CRDS, contribution patronale), on se reportera aux précisions figurant au Bulletin officiel de la sécurité sociale (BOSS).

Autres indemnités et documents à remettre au salarié

S’il quitte l’entreprise avant d’avoir pu prendre la totalité des congés payés qu’il avait acquis, le salarié a droit à une indemnité compensatrice de congés payés, ainsi qu’à l’ensemble des éléments de rémunération dus par l’employeur à la date de la rupture du contrat de travail.

Au moment du départ de l’entreprise, doit remettre au salarié (ou, selon le cas, tenir à sa disposition) un certain nombre de documents : certificat de travail, solde de tout compte, attestation pour faire valoir ses droits aux allocations chômage (dite « attestation France Travail » ou « attestation Pôle emploi » – France Travail, nouvel opérateur du service public de l’emploi, remplace Pôle emploi depuis le 1er janvier 2024), etc.