La modification du contrat de travail

Deux situations doivent être distinguées :

  • l’employeur peut souhaiter modifier un ou plusieurs éléments essentiels du contrat de travail : dans ce cas, cette modification, assimilée à une modification du contrat lui-même, nécessite l’accord du salarié concerné ;
  • les modifications décidées par l’employeur peuvent ne constituer qu’un changement des conditions de travail du salarié ; dans ce cas, l’employeur peut imposer ces changements au salarié, dans le cadre de son pouvoir de direction.

À savoir
Même si la modification du contrat de travail est décidée à titre de sanction disciplinaire, le salarié peut la refuser.


L’employeur peut-il modifier le contrat de travail ?

L’employeur peut proposer au salarié une modification d’un élément essentiel de son contrat de travail ou un simple changement de ses conditions de travail.

Situation des salariés protégés
L’employeur ne peut imposer au salarié bénéficiant d’une protection particulière (délégué syndical, membre élu de la délégation du personnel au CSE, etc.) ni une modification de son contrat de travail, ni un simple changement de ses conditions de travail (y compris un placement en activité partielle). Dans l’un ou l’autre cas, l’accord du salarié est requis. En cas de refus, il appartient à l’employeur, soit de maintenir le salarié dans ses fonctions, soit de mettre en œuvre la procédure spéciale de licenciement.

Les éléments essentiels du contrat de travail ne font pas l’objet d’une définition légale. En font partie la rémunération, la qualification, la durée du travail stipulée au contrat (voir toutefois ci-dessous) et, plus généralement, les attributions du salarié.

La modification peut également porter sur un élément du contrat qui pouvait être déterminant pour le salarié lors de la conclusion du contrat à condition que cela soit stipulé par une clause claire et précise dans le contrat de travail ou dans un avenant à ce contrat.

Exemples :

  • Le lieu de travail. Le changement de lieu de travail constitue une modification du contrat de travail si le nouveau lieu de travail se situe dans un secteur géographique différent. Même dans ce cas, il n’y a toutefois pas modification du contrat de travail si le salarié est soumis à une obligation contractuelle ou conventionnelle de mobilité. Le contrat de travail (ou un avenant à ce contrat) peut toutefois prévoir, par une clause claire et précise, que le salarié exécutera son travail exclusivement dans le lieu qu’il mentionne ; dans ce cas, tout changement de lieu de travail, y compris dans le même secteur géographique, constitue une modification d’un élément essentiel du contrat de travail qui ne peut être imposée au salarié. A noter également que la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail, rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés, lorsqu’elle intervient en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, ou en cas de force majeure.
  • L’horaire du travail, si la modification est importante, par exemple : passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit - ou inversement -, passage d’un horaire fixe à un horaire variable ou passage d’un horaire continu à un horaire discontinu.

Quelles sont les conséquences d’un refus du salarié ou d’un défaut de réponse ?

  • Le simple changement des conditions de travail peut être imposé par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction. Le refus du salarié n’entraîne pas, à lui seul, la rupture du contrat mais constitue une faute professionnelle que l’employeur peut sanctionner, au besoin par le licenciement.
    L’employeur peut éventuellement prononcer un licenciement pour faute grave, sans préavis ni indemnités.
  • La modification d’un élément essentiel du contrat de travail ne peut être imposée par l’employeur, mais seulement proposée au salarié concerné. En cas de refus de ce dernier, il appartient à l’employeur, soit de renoncer à modifier le contrat, soit de licencier le salarié. Il doit alors respecter la procédure de licenciement, le préavis et, le cas échéant, verser des indemnités de licenciement.

Une modification peut être prévue par une clause du contrat de travail (clause de mobilité, clause de changement d’horaire par exemple). La mise en œuvre d’une telle clause ne constitue pas une modification du contrat de travail soumise à l’accord du salarié si son application n’est pas abusive, c’est à dire si elle est décidée dans l’intérêt de l’entreprise (et non pour nuire au salarié) et réalisée après un délai de prévenance (et non de façon précipitée)…

La réduction du temps de travail par voie d’accord constitue-t-elle une modification du contrat de travail ?

La réduction du temps de travail organisée par voie de convention ou d’accord collectif constitue une modification du contrat de travail si elle s’accompagne d’une réduction de rémunération ou d’un avantage prévu par le contrat par exemple. Lorsque le ou les salariés concernés refusent une telle modification, l’employeur peut procéder à leur licenciement en respectant - pour chacun d’eux - la procédure de licenciement individuel.
En revanche, la seule diminution des heures de travail résultant de l’accord collectif est assimilée à un simple changement des conditions de travail que le salarié est tenu d’accepter.

Le salarié dispose-t-il d’un délai pour refuser la modification du contrat ?

Le salarié auquel est proposée une modification d’un élément essentiel de son contrat de travail dispose d’un délai de réflexion.

Si la modification n’a pas une cause économique

La loi ne prévoit pas de procédure particulière. Cependant l’employeur doit informer le salarié de sa proposition de modification et lui laisser un délai suffisant de réponse. L’absence de réponse du salarié au terme de ce délai ne vaut pas acceptation. Le salarié peut réagir, même longtemps après la mise en œuvre de la modification. La procédure à suivre peut également résulter des dispositions de la convention collective applicable à l’entreprise, à laquelle il conviendra donc, le cas échéant, de se reporter.

Pour tout litige concernant la modification et la rupture du contrat de travail, l’employeur comme le salarié peuvent saisir le conseil de prud’hommes.

Si la modification a une cause économique

Lorsque la modification envisagé d’un élément essentiel du contrat de travail repose s’un l’un des motifs économiques énoncés à l’article L. 1233-3 du code du travail, l’employeur informe chaque salarié de sa proposition par lettre recommandée avec accusé de réception (ou par LR électronique répondant aux exigences posées par les articles L. 100 et R. 53-1 à R. 53-4 du code des postes et des communications électroniques, à condition que le salarié ait consenti à recevoir des envois recommandés électroniques).

Cette lettre doit préciser le motif économique pour lequel cette modification est envisagée. Conformément aux dispositions de l’article L. 1222-6 du code du travail, le salarié dispose alors d’un délai d’un mois (ou de quinze jours si l’entreprise est en redressement judiciaire ou en liquidation judiciaire) pour faire connaître son refus (ce délai doit être mentionné dans la lettre). À défaut de réponse dans ce délai, le salarié est réputé avoir accepté la modification proposée. Selon la Cour de cassation (arrêts du 25 juin 2008 et du 8 novembre 2023), le salarié doit être informé de ses nouvelles conditions d’emploi, et le délai d’un mois qui lui est laissé constitue une période de réflexion destinée à lui permettre de prendre parti sur la proposition de modification en mesurant les conséquences de son choix ; l’inobservation de ces obligations par l’employeur prive de cause réelle et sérieuse le licenciement fondé sur le refus par un salarié de la modification de son contrat de travail.

  • Constitue un licenciement économique, le licenciement effectué par l’employeur résultant d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel de son contrat de travail consécutive notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ou à une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité.
  • Lorsqu’au moins 10 salariés ont refusé la modification d’un élément essentiel de leur contrat de travail proposée par leur employeur pour un motif économique et que leur licenciement est envisagé, celui-ci est soumis aux dispositions applicables en cas de licenciement collectif pour motif économique (notamment l’obligation pour l’employeur d’élaborer un plan de sauvegarde de l’emploi).
  • Des dispositions spécifiques sont applicables en cas de mise en œuvre, dans l’entreprise, d’un accord de performance collective.