Ouverture de la première réunion du conseil d’orientation du CPA

Mesdames et Messieurs les représentants des organisations syndicales et des organisations d’employeurs,

Messieurs les représentants des régions,

Mesdames et Messieurs,

  • Il y a à peine plus d’un an, la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi posait le principe de la création du compte personnel d’activité. A l’époque, le CPA n’était encore qu’une idée. Ses contours, ses finalités, les droits qu’il allait intégrer faisaient encore débat.
  • Nous nous retrouvons aujourd’hui dans un moment bien différent. Le CPA va bientôt devenir une réalité pour les Français. Son contenu a été défini par la « loi travail » du 8 août 2016, ses décrets d’application vous ont été soumis, son portail numérique sera opérationnel dès le début du mois de janvier 2017.
  • Il s’agit d’une réforme sociale majeure. Sa finalité est ambitieuse : donner à chaque actif les moyens de prendre en main son parcours professionnel. Dans un monde du travail moins stable, où les transitions professionnelles sont de plus en plus fréquentes, où les Français aspirent à la mobilité mais ne savent souvent pas comment la réaliser, sa mise en place est d’une impérieuse nécessité.
  • On a souvent dit que le CPA ne faisait que regrouper des droits existants. Ceux qui l’ont dit n’ont pas lu la loi. Les avancées issues de ce texte sont nombreuses et vont dans trois directions :
    a) L’universalité, avec l’extension du compte personnel de formation aux travailleurs indépendants et aux fonctionnaires. Pour ces derniers, comme vous le savez la concertation conduite par Annick Girardin s’est achevée hier et un projet d’ordonnance sera
    transmis au Conseil d’Etat pour être adopté avant la fin de l’année.
    b) La justice sociale, avec le renforcement des droits des jeunes décrocheurs, sous la responsabilité des régions, et des salariés non qualifiés ; la justice sociale passe aussi par l’attribution de plus de droits à ceux qui s’engagent en faveur de l’intérêt collectif, et c’est le sens du compte d’engagement citoyen.
    c) Le renforcement des capacités d’action de la personne, ce qu’on appellerait en anglais « l’empowerment  » : le CPA donne plus de possibilités à la personne, en lui permettant par exemple de faire un bilan de compétences ou de se lancer dans un projet de création d’entreprise.
  • Cette réforme doit beaucoup aux partenaires sociaux. Elle n’aurait jamais existé sans la réflexion ancienne de plusieurs de vos organisations, qui sous des appellations et des conceptions diverses (« sécurisation des parcours professionnels », « sécurité sociale professionnelle », « nouveau contrat social ») ont défendu l’idée que les droits devaient être attachés à la personne et non à l’emploi.
  • La réforme fait suite à plusieurs accords nationaux interprofessionnels, celui de 2008 qui a rendu portable le droit individuel à la formation, celui de 2013 qui a créé le compte personnel de formation, transposé par la loi du 5 mars 2014 sur la formation professionnelle. Le CPA intègre également le compte pénibilité, issu de la loi du 20 janvier 2014 sur la réforme des retraites. Quant à la position commune issue de la négociation sur le CPA, elle n’a certes pas été signée par un nombre suffisant d’organisations, mais elle a inspiré la loi.
  • Le CPA s’inscrit dans ce cheminement. Et je voudrais particulièrement insister sur la continuité entre CPF et CPA. Le CPF a été un grand progrès, avec la portabilité des droits, le recentrage sur les formations qualifiantes, le meilleur accès à la formation des demandeurs d’emploi. 3,6 millions de comptes ont été ouverts, 600 000 formations validées, près de 40 % de formations ont été suivies par des personnes de niveau inférieur au baccalauréat.
  • Un travail considérable a été effectué par les institutions paritaires pour définir les listes de formations éligibles. Cela a donné plus de sens et de structuration à un marché de la formation qui n’était pas suffisamment régulé.
  • Le CPF est renforcé par la loi travail et il sera la clé de voûte du CPA. Le CPA permettra d’embrasser un ensemble de publics plus vastes (fonctionnaires, indépendants) et d’en élargir les usages pour en faire l’instrument central de la sécurisation des parcours professionnels.

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  • Nous avons besoin d’un travail collectif sur le CPA. Le CPA appartient à chacune des parties prenantes autour de la table :
      les syndicats, qui représentent les salariés, les demandeurs d’emploi et les agents publics titulaires du CPA ;
      les organisations patronales, à la fois comme représentants des employeurs qui financent les droits, et comme représentants des travailleurs indépendants qui seront titulaires du CPA ;
      les régions, collectivités chef de file sur la formation professionnelle, responsables du service public régional de l’orientation et qui sont en charge du droit à la nouvelle chance pour les jeunes décrocheurs ;
      et bien sûr l’Etat, qui a assumé la conception et le financement du système d’information du CPA, et qui financera aussi le compte d’engagement citoyen.
  • C’est pourquoi nous avons souhaité mettre en place ce conseil d’orientation du CPA, dont la composition reflète bien l’universalité de ce nouveau droit. Nous nous sommes inspirés à cet égard des réflexions du rapport des députés Jean-Patrick Gille et de Gérard Cherpion sur la mise en œuvre de la loi du 5 mars 2014 et du premier rapport annuel du CNEFOP sur la mise en œuvre du CPF.
  • Je tiens à souligner que la concertation sur les nouveaux droits qui pourraient être inclus à l’avenir dans le CPA, prévue par l’article 42 de la loi du 8 août 2016, se tiendra dans un cadre distinct, qui ne concerne selon les termes de la loi que les organisations représentatives au niveau interprofessionnel.
  • Quel est l’objet de ce conseil d’orientation que nous lançons aujourd’hui ?
  • Il est d’abord de vous donner toutes les informations nécessaires sur la conduite opérationnelle du projet. Plusieurs présentations détaillées vous seront faites aujourd’hui, par la directrice de projet CPA, par mon cabinet et mon administration ainsi que par les représentants de Patrick Kanner et d’Annick Girardin, que je remercie de leur présence. Mon administration est à votre disposition pour toute question technique durant cette réunion et postérieurement.
  • Mais je souhaite que nous allions bien au-delà d’une simple information. Je souhaite que nous construisions ensemble des réponses collectives, et si possibles consensuelles, à 3 questions que nous nous posons. Ces 3 questions ne sont bien sûr pas exclusives d’autres questions que vous pouvez vous poser et nous serons à votre écoute à ce propos.
  • Je souhaite qu’à partir de ces questions, nous élaborions une feuille de route partagée du CPA, qui serait établie progressivement au sein de ce conseil d’ici début 2017.

  • 1re question, comment réussir les avancées que représente le CPA ?
  • Le CPA, ce sont de nouveaux publics avec l’extension aux indépendants et aux agents publics ; de nouveaux droits reconnus aux salariés non qualifiés, aux jeunes décrocheurs et à ceux qui s’engagent grâce au compte d’engagement citoyen ; de nouveaux usages du CPF avec l’éligibilité des bilans de compétences et des parcours d’appui à la création d’entreprise.
  • Au-delà des décrets qui ont été concertés avec vous et soumis au CNEFOP (et il en ira de même du décret sur les travailleurs indépendants qui sera soumis très prochainement aux organisations concernées), c’est l’appropriation de ces nouvelles possibilités par les acteurs de l’emploi et de la formation professionnelle que nous devons réussir.

  • 2e question : comment réussir l’accompagnement à l’usage du CPA ?
  • Le CPA est un droit de la personne, mais sa mise en œuvre nécessitera pour beaucoup un accompagnement. Celui-ci passe d’abord par le conseil en évolution professionnelle.
  • Le CEP est une des grandes avancées de la loi du 5 mars 2014. Il se met en place et se structure. La loi du 8 août 2016 nous invite à aller plus loin : le CPA donne plus de capacités d’action à la personne, que le conseiller en évolution professionnelle doit accompagner ; à la suite d’un amendement du rapporteur Christophe Sirugue, la loi demande au conseiller en évolution professionnelle de développer l’information directe de leurs usagers.
  • Je vous propose aussi que nous reprenions le fil des intéressants développements de la position commune CPA sur l’accompagnement global. Il nous faut travailler sur les liens entre CPA et accompagnement social, car cela est important pour l’accès à la formation des personnes en difficulté.

  • 3e question, comment réussir l’information des usagers ?
  • Le CPA est un outil à la main de la personne. C’est à elle de l’activer et à elle de décider de sa mobilisation. Le CPA ne réussira donc que si nous parvenons à le faire connaître des usagers et à en faire comprendre les possibilités. Et nous devons veiller à ne pas toucher seulement les plus qualifiés, souvent les plus rapides à se saisir des nouveaux droits mais qui ne sont pas ceux qui en ont le plus besoin.
  • Une campagne d’information va être engagée par l’Etat et va vous être présenté par la direction de la communication de mon ministère. Mais chacune des parties prenantes autour de la table a une capacité propre à toucher les usagers. Les organisations syndicales, qui informent des millions de salariés et d’agents publics sur leurs droits. Les organisations d’employeurs, car l’employeur est souvent le premier interlocuteur du salarié sur les questions de formation. Les régions qui sont responsables de l’orientation dans le cadre du SPRO.
  • Enfin, je n’oublie pas bien sûr les enjeux liés au système d’information. Le CPA est basé sur le système d’information du CPF, dont la maîtrise d’ouvrage est partagée entre l’Etat et les partenaires sociaux et le restera. Les évolutions du SI CPF induites par le CPA doivent être pleinement discutées.
  • Le CPA ajoute à ce SI une plateforme de services numériques, qui vont aider la personne à construire son parcours professionnel. Ils ont été construits en partant des besoins des utilisateurs, exprimés par des groupes d’utilisateurs, et développés par des startups. Cette plateforme sera constamment enrichie au-delà du 1er janvier 2017.
  • Les équipes en charge de la réalisation du CPA nous éclaireront à chaque étape de nos réflexions communes sur la faisabilité technique de nos souhaits d’évolutions du CPA et des services qui l’accompagnent.
  • Ce travail sera réalisé en lien étroit avec les évolutions du SI-CPF. C’est le sens de la direction commune de projet que nous avons mis en place.

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  • Des présentations vous seront donc faites sur chacune de ces 3 questions et sur le portail numérique, et seront suivies à chaque fois d’un temps de discussion. L’objectif est que nous puissions mieux cerner à l’issue de cette réunion les chantiers de la feuille de route du CPA, qui pourront ensuite être approfondis lors des prochaines réunions.
  • En conclusion, je voudrais dire qu’il y a un temps politique et un temps social. Chacun est conscient que nous sommes à 6 mois d’échéances politiques majeures pour notre pays. Mais le CPA appartient au temps social, qui est un temps plus long et sa mise en œuvre va enjamber les échéances politiques. Il est donc capital que nous jetions les bases d’un cadre collectif de travail, capable d’accompagner cette mise en œuvre tout au long de l’année 2017.