Discours de François REBSAMEN - Conseil d’orientation de l’AFPA, lundi 18 mai 2015

Mesdames et messieurs,

Je vous remercie de m’accueillir au conseil d’orientation de l’AFPA. Cette instance est un lieu privilégié d’échanges sur la situation de l’organisme, sur ses perspectives et les défis qu’il a à relever.

En octobre dernier, nous avons pu faire ensemble, avec les partenaires sociaux et les Régions, un point d’étape sur la mise en place du plan de refondation de l’AFPA décidé en 2012. Cela a été l’occasion de lancer une réflexion pour plus et mieux mobiliser l’AFPA dans les politiques en faveur de la formation et de l’emploi.

Conformément aux annonces du Premier ministre de la semaine dernière, nous avons proposé une réunion rapide du conseil d’orientation, et je vous remercie de vous être mobilisés pour y être présents dans des délais contraints et des agendas que je sais chargés. Il me semblait en effet nécessaire que nous nous rencontrions au plus tôt en amont du processus parlementaire engagé autour du projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi. Vous le savez sûrement, l’article 21 de ce projet concerne directement l’AFPA : il propose de modifier le code du travail pour y inscrire le rôle de l’AFPA au sein du service public de l’emploi. Il faut y voir la grande confiance du gouvernement dans les missions de l’association. Au-delà, le projet de loi doit permettre d’intégrer les évolutions législatives nécessaires pour que les orientations issues des travaux engagés depuis la fin de l’année dernière soient mises en œuvre.

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Ces travaux et réflexions portant sur le nouveau plan stratégique ont permis de dégager une certaine convergence de l’ensemble des partenaires autour de plusieurs constats :

1. Le premier est l’engagement partagé pour la pérennité de l’AFPA, acteur majeur de la formation professionnelle et de l’insertion des demandeurs d’emplois et des salariés en France.

Comme le Premier ministre l’a rappelé le 12 mai dernier, l’AFPA est un acteur essentiel de la bataille pour l’emploi et de l’évolution professionnelle des salariés. Et, je le redis, un élément du patrimoine historique de la Nation. Nous en avons collectivement besoin. Elle accueille chaque année environ 140000 stagiaires dont 58% de demandeurs d’emploi. Elle offre la possibilité aux demandeurs d’emploi de se former à des métiers où il existe des opportunités économiques et de retrouver ainsi une place sur le marché du travail.

En témoignent également l’importance de ses capacités d’accueil et d’hébergement, le maillage de son réseau, qui participe à l’aménagement du territoire national et régional, ainsi que les missions spécifiques qu’elle exerce pour l’Etat dans le domaine de l’ingénierie des titres et des certifications, qui à bien des égards revêt des aspects régaliens.

2. Le deuxième constat est l’ampleur des évolutions déjà réalisées et à poursuivre par l’AFPA pour s’adapter au nouveau contexte de la formation professionnelle.

L’AFPA a dû faire face à une profonde évolution de son modèle économique avec la décentralisation et l’ouverture à la concurrence de la commande publique de formation professionnelle des demandeurs d’emplois. Dans le cadre du plan de refondation, les efforts réalisés ont été considérables pour adapter l’offre de formation et améliorer sa rentabilité.

Je tiens à cet égard à saluer l’engagement de la gouvernance et des salariés de l’AFPA dans cette mobilisation. La poursuite de cette transformation est toujours aujourd’hui un impératif, car nous sommes encore à mi-chemin et le marché de la formation est lui-même dans une phase d’évolution profonde. Car l’AFPA doit, d’un côté, adapter l’offre au plus près des territoires, répondre aux attentes des donneurs d’ordre, au premier rang desquels les Régions, et de l’autre tirer pleinement parti de la réforme de la formation professionnelle en se positionnant comme un acteur efficace du marché concurrentiel. A ce dernier titre les opportunités ne manquent pas car, vous le savez, la réforme que nous conduisons ensemble privilégie les formations au socle de connaissance, les formations qualifiantes, les formations modulaires, et les organismes de formation capables de rentrer dans une démarche de qualité de service structurée : autant d’éléments sur lesquels l’AFPA, si elle sait faire évoluer ses modes de fonctionnement, disposera d’avantages comparatifs déterminants.

3. Le troisième constatest qu’il appartient à l’Etat de définir pour l’AFPA un cadre juridique sécurisé et pérenne pour mettre en œuvre ses orientations stratégiques.

Certes, la formation professionnelle des demandeurs d’emploi relève de la responsabilité première des Régions. Mais l’Etat est l’acteur légitime pour définir un cadre juridique sécurisé pour l’AFPA. Comment ? En clarifiant son rôle, en affirmant ses missions spécifiques dans le cadre du service public de l’emploi, en apportant une réponse durable à la question toujours en suspens du patrimoine immobilier. Cette dernière question, nous le savons, est source d’incertitude et de risque juridique.

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Pour répondre à ces enjeux, les réflexions menées ces derniers mois ont montré qu’une évolution du statut de l’AFPA était nécessaire, afin de sécuriser les financements et l’exercice des missions de service public.

C’est pourquoi, et je tenais à en faire l’annonce devant vous, le Gouvernement souhaite procéder à la création d’un établissement public et commercial (EPIC) qui exercera les missions de l’AFPA.

Dans le cadre de la discussion sur le projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi, le gouvernement déposera ainsi un amendement l’habilitant àagir par ordonnance afin de :
 procéder à la création de l’EPIC.
 définir les conditions de dévolution à cet établissement d’actifs immobiliers de l’Etat aujourd’hui occupé par l’AFPA
 préciser les conditions de transfert des biens, droits et obligations de l’AFPA vers ce nouvel établissement.

C’est donc une nouvelle étape majeure que nous proposons pour l’AFPA dans sa transformation. L’évolution vers un EPIC répond à un objectif de sécurisation juridique, au regard des règles communautaires relatives aux aides d’Etat et de faciliter le règlement de la question immobilière. Cela permettra la dévolution d’une partie du patrimoine de l’Etat aujourd’hui occupé par l’AFPA, de régler durablement la question du rattachement de son patrimoine immobilier, et de mettre fin aux incertitudes juridiques dont souffre l’association.

Le statut d’établissement public permettra également d’affirmer les missions de service public de l’AFPA, de leur donner un cadre clair, en affirmant aussi la transparence par rapport aux activités concurrentielles. Quelles sont ces missions ?

1. la mission « régalienne » d’ingénierie de la certification et des titres professionnels

2. répondre aux besoins d’intérêt général de formation lorsque le marché ne suffit pas à les couvrir. Je pense notamment aux formations rares ou émergentes sur des secteurs stratégiques, ou aux prestations spécifiques pour les publics les plus éloignés de l’emploi, qui intègrent accueil, formation adaptée, hébergement, animation socio-culturelle, appui administratif et social)

3. De manière un peu plus prospective, mettre à disposition des acteurs de la formation des infrastructures (plateaux techniques et capacités d’hébergement), voire des prestations (formation de formateurs, organisation de sessions de validation…) accessibles sur l’ensemble du territoire à un prix abordable. La formation étant un levier essentiel de la compétitivité de notre économie et de l’insertion professionnelle des actifs menacés par la précarité, cette mission est bien un service public stratégique pour notre pays. Elle est une contrepartie de la dévolution par l’Etat. Si cette avancée représente une grande opportunité pour l’AFPA, elle est aussi synonyme d’une nouvelle exigence, celle de gérer de manière efficiente ses biens immobiliers.

Ce statut est source de valorisation symbolique et de sécurisation juridique. Mais il est aussi et surtout, je veux être clair sur ce point, porteur d’exigences renforcées pour l’AFPA.

Être un opérateur de l’État induit en effet de nouvelles exigences et notamment, d’entrer rapidement dans une logique de contractualisation et de suivi d’objectifs et de moyens avec l’État et ses partenaires. Et si l’État continuera d’accompagner financièrement l’AFPA pour la mise en œuvre de son plan de refondation, il lui demandera d’être à la hauteur des exigences de compétitivité et d’efficacité sur les secteurs concurrentiels. Il lui demandera aussi de continuer sa transformation, notamment sur les points les plus essentiels quant à la délivrance des missions de service public et sur les principaux enjeux de compétitivité sur le marché concurrentiel. Je sais d’ailleurs pouvoir compter sur l’engagement d’Yves BAROU et de son équipe, avec qui nous travaillons de manière intense et créative, pour construire avec nous ces nouvelles relations entre Etat et opérateur.

Car l’ensemble du plan stratégique de l’AFPA, parce qu’il vise à la pérennité du dispositif, doit être pleinement conforme au droit communautaire de la concurrence et sera élaboré en lien avec la commission européenne. Et comme vous le savez, si le droit communautaire permet le subventionnement d’activités d’intérêt général, c’est dans le cadre d’une exigence très forte de transparence comptable afin de mettre chacun à même de vérifier que les subventions ne sont pas utilisées, même en partie, pour financer des activités concurrentielles. Il existe donc un chemin qui permet, dans les mois qui viennent, de consolider les missions d’intérêt général de l’AFPA, tout en mettant en place les garanties de la séparation stricte entre les activités subventionnées et les activités relevant de l’achat concurrentiel, qu’il soit public ou privé.

C’est en empruntant ce chemin que l’AFPA pourra développer son activité et assurer ainsi son équilibre financier, en s’appuyant sur les apports de la réforme de la formation professionnelle.

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Mesdames et messieurs,

Vous l’aurez compris, le gouvernement est mobilisé pour accompagner et conforter l’AFPA dans son statut original d’organisme de formation opérateur du service public de l’emploi. Ses missions sont justement fondamentales dans la bataille pour l’emploi que nous menons. C’est pourquoi nous les avons précisées et confortées en consolidant leur base légale.

Je sais bien que ce que je décris là ne va pas recueillir l’accord de tous sur tout, car une telle unanimité ne serait pas possible sur l’AFPA. Mais je suis convaincu que vous savez tous que ce gouvernement a une vision et une ambition pour l’AFPA, que le service public y est en plein cœur, et que le dispositif ainsi proposé et les exigences ici rappelées sont la seule manière de sécuriser juridiquement et de manière pérenne le modèle original de l’AFPA.

Et, au-delà des divergences, je sais pouvoir compter sur votre mobilisation pour soutenir la démarche de transformation et de pérennisation de l’AFPA dans laquelle ce gouvernement s’engage pleinement aux côtés de l’équipe de direction de l’AFPA.

Je vous remercie.