Bulletin Officiel du Travail, de lEmploi et de la Formation Professionnelle
No 2002/9 du lundi 20 mai 2002
NOR : MEST0210674D
Le Premier ministre,
Sur le rapport de la ministre de lemploi et de la solidarité, du ministre de lagriculture et de la pêche et du ministre de léquipement, des transports et du logement,
Vu la directive 93/104/CE du 23 novembre 1993 modifiée concernant certains aspects de laménagement du temps de travail ;
Vu le code du travail, notamment les articles L. 213-2, L. 213-3, L. 213-4 et L. 213-5 issus de larticle 17 de la loi no 2001-397 du 9 mai 2001 relative à légalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;
Vu le code rural ;
Vu le décret no 82-397 du 11 mai 1982 modifié relatif à lorganisation et au fonctionnement des services médicaux du travail en agriculture ;
Vu lavis du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels en date du 29 mai 2001 ;
Vu lavis de la Commission nationale dhygiène et de sécurité du travail en agriculture en date du 3 juillet 2001 ;
Vu les avis des organisations syndicales les plus représentatives au plan national des employeurs et des salariés ;
Le Conseil dEtat (section sociale) entendu,
Décrète :
Art. 1er. - Le chapitre III du titre Ier du livre II du code du travail (partie Réglementaire) comprend quatre sections ainsi rédigées :
« Section 1
« Définition du travailleur de nuit
« Art. R. 213-1. - En labsence de définition par une convention ou un accord collectif étendu du nombre minimal dheures de travail de nuit et de la période de référence mentionnés au 2o de larticle L. 213-2, ce nombre minimal est de 270 heures de travail accomplies pendant une période de 12 mois consécutifs.
« Section 2
« Dispositions concernant les dérogations
à la durée maximale quotidienne du travail de nuit
« Art. R. 213-2. - Il peut être dérogé par une convention ou un accord collectif de branche étendu à la durée maximale quotidienne de 8 heures fixée au premier alinéa de larticle L. 213-3 pour les activités suivantes :
« 1o Activités caractérisées par léloignement entre le domicile et le lieu de travail du salarié ou par léloignement entre différents lieux de travail du salarié ;
« 2o Activités de garde, de surveillance et de permanence caractérisées par la nécessité dassurer la protection des biens et des personnes ;
« 3o Activités caractérisées par la nécessité dassurer la continuité du service ou de la production.
« Art. R. 213-3. - I. - Il peut être dérogé à la durée maximale quotidienne de 8 heures fixée au premier alinéa de larticle L. 213-3, sur autorisation de linspecteur du travail, dans le cas de faits dus à des circonstances qui sont étrangères à lemployeur, anormales et imprévisibles, ou à des événements exceptionnels dont les conséquences nauraient pu être évitées. Les demandes de dérogation, accompagnées des justifications utiles, de lavis du comité dentreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, sils existent, et du procès-verbal de consultation des délégués syndicaux, sils existent, sont adressées par lemployeur à linspecteur du travail. En labsence de délégué syndical, de comité dentreprise et de délégués du personnel, la demande est accompagnée dun document attestant une information préalable des salariés.
« Dans un délai maximum de quinze jours suivant la date de réception de la demande, linspecteur du travail fait connaître sa décision à lemployeur ainsi que, sil y a lieu, aux représentants du personnel.
« Les recours hiérarchiques dirigés contre cette décision doivent être portés devant le directeur régional du travail et de lemploi, le directeur régional du travail des transports ou le chef du service régional de linspection du travail, de lemploi et de la politique sociale agricoles le cas échéant, et être formés, à peine de forclusion, dans le délai dun mois suivant la date à laquelle les intéressés en ont reçu notification.
« II. - Lorsque les circonstances mentionnées au I ci-dessus impliquent nécessairement lexécution de travaux urgents en vue dorganiser des mesures de sauvetage, prévenir des accidents imminents ou réparer des accidents survenus au matériel, aux installations ou aux bâtiments, lemployeur peut déroger sous sa propre responsabilité à la durée de 8 heures fixée au premier alinéa de larticle L. 213-3. Sil na pas encore adressé de demande de dérogation, il doit présenter immédiatement à linspecteur du travail une demande de régularisation accompagnée des justifications, de lavis du comité dentreprise ou, à défaut des délégués du personnel, sils existent, du procès-verbal de consultation des délégués syndicaux, sils existent, et de toutes explications nécessaires sur les causes ayant nécessité une prolongation de la durée quotidienne du travail sans autorisation préalable.
« Sil se trouve dans lattente dune réponse à une demande de dérogation, il doit informer immédiatement linspecteur du travail de lobligation où il sest trouvé danticiper la décision attendue et en donner les raisons.
« Dans lun et lautre cas, linspecteur du travail fait connaître sa décision dans un délai maximum de quinze jours suivant la date de réception de la demande.
« Art. R. 213-4. - Il peut être fait application des dérogations prévues aux 2o de larticle L. 213-3 et R. 213-3 à condition que des périodes de repos dune durée au moins équivalente au nombre dheures effectuées en application de la dérogation soient accordées aux salariés concernés. Ce repos doit être pris dans les plus brefs délais à lissue de la période travaillée. Lorsque, dans des cas exceptionnels, loctroi de ce repos nest pas possible pour des raisons objectives, une contrepartie équivalente permettant dassurer une protection appropriée au salarié concerné doit être prévue par accord collectif.
« Section 3
« Dispositions concernant laffectation
de travailleurs à des postes de nuit
« Art. R. 213-5. - En labsence de convention ou daccord collectif et à condition que lemployeur ait engagé sérieusement et loyalement des négociations tendant à la conclusion dun tel accord, les travailleurs peuvent être affectés à des postes de nuit sur dérogation accordée par linspecteur du travail. La demande dautorisation daffectation dérogatoire de travailleurs à des postes de nuit, présentée à linspecteur du travail par lemployeur sur le fondement du troisième alinéa de larticle L. 213-4, justifie, de façon circonstanciée, les contraintes propres à la nature de lactivité ou au fonctionnement de lentreprise qui rendent nécessaire le travail de nuit eu égard aux exigences de continuité de lactivité économique ou des services dutilité sociale.
« La demande doit être également accompagnée des éléments permettant de vérifier le caractère loyal et sérieux de lengagement préalable de négociations dans le délai maximum de 12 mois précédant la demande, lexistence de contreparties et de temps de pause, la prise en compte des impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs. Lavis des délégués syndicaux et du comité dentreprise, ou des délégués du personnel, sil en existe, doit être joint à la demande. En labsence de délégué syndical, de comité dentreprise et de délégué du personnel, la demande est accompagnée dun document attestant une information préalable des salariés.
« Dans le délai de trente jours à compter de la date de réception de la demande, linspecteur du travail fait connaître sa décision à lemployeur et, sil y a lieu, aux représentants du personnel.
« Les recours hiérarchiques dirigés contre cette décision doivent être portés devant le directeur régional du travail, de lemploi et de la formation professionnelle, le directeur régional du travail des transports ou le chef du service régional de linspection du travail, de lemploi et de la politique sociale agricoles le cas échéant, et être formés, à peine de forclusion, dans un délai dun mois suivant la date à laquelle les intéressés ont reçu notification de la décision contestée.
« Section 4
« Surveillance médicale des travailleurs de nuit
« Art. R. 213-6. - Les travailleurs de nuit bénéficient dune surveillance médicale renforcée qui a pour objet de permettre au médecin du travail dapprécier les conséquences éventuelles pour leur santé et leur sécurité du travail de nuit, notamment du fait des modifications des rythmes chronobiologiques, et den appréhender les répercussions potentielles sur leur vie sociale.
« Cette surveillance médicale renforcée sexerce dans les conditions suivantes :
« a) Un travailleur de nuit ne peut être affecté à un poste de nuit que sil a fait lobjet dun examen préalable par le médecin du travail et si la fiche daptitude établie en application de larticle R. 241-57 du présent code ou du I de larticle 40 du décret no 82-397 du 11 mai 1982 relatif à lorganisation et au fonctionnement des services médicaux du travail en agriculture, sil sagit dun travailleur agricole, atteste que son état de santé est compatible avec une affectation à un poste de nuit ; cette fiche indique la date de létude du poste de travail et celle de la dernière mise à jour de la fiche dentreprise lorsquelle est exigible ; la fiche daptitude est renouvelée tous les six mois, après examen du travailleur par le médecin du travail ;
« b) Sous réserve des dispositions du décret précité du 11 mai 1982 concernant les salariés agricoles, le médecin du travail est informé par lemployeur de toute absence, pour cause de maladie, des travailleurs de nuit ;
« c) En dehors des visites périodiques, tout travailleur de nuit peut bénéficier dun examen médical à sa demande ;
« Le médecin du travail prescrit, sil le juge utile, des examens spécialisés complémentaires ; ces examens sont à la charge de lemployeur ;
« d) Des recommandations précisant les modalités des examens à pratiquer en vue dassurer la surveillance médicale des travailleurs de nuit font lobjet, en tant que de besoin, dun arrêté des ministres chargés du travail et de lagriculture.
« Art. R. 213-7. - Le médecin du travail analyse les éventuelles répercussions sur la santé des travailleurs des conditions du travail nocturne, notamment des horaires et du rythme de celui-ci. Il examine, plus particulièrement, les conséquences de lalternance des postes et de sa périodicité dans le cas du travail en équipes alternantes comportant un poste de nuit.
« A cet effet, le médecin du travail procède, pendant les périodes au cours desquelles sont occupés les travailleurs de nuit, à létude des conditions de travail et du poste de travail. Il analyse ensuite le contenu du poste et ses contraintes, pour chaque salarié.
« Sur la base des éléments ainsi recueillis, il conseille le chef dentreprise ou son représentant sur les modalités dorganisation du travail de nuit les mieux adaptées aux travailleurs, en fonction du type dactivité.
« Art. R. 213-8. - I. - Le médecin du travail informe les travailleurs de nuit, et plus particulièrement les femmes enceintes et les travailleurs vieillissants, des incidences potentielles du travail de nuit sur la santé. Cette information tient compte de la spécificité des horaires : horaire fixe ou horaire alterné. Il les conseille sur les précautions éventuelles à prendre.
« II. - Pour les entreprises employant des travailleurs de nuit, le rapport annuel dactivité du médecin du travail, prévu à larticle R. 241-33, traite du travail de nuit tel quil a été pratiqué dans lentreprise dans lannée considérée. »
Art. 2. - Après le sixième alinéa de larticle R. 241-42 du code du travail, sont insérés les mots : « De mise en place ou de modification de lorganisation du travail de nuit ».
Art. 3. - La ministre de lemploi et de la solidarité, le ministre de léquipement, des transports et du logement et le ministre de lagriculture et de la pêche sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de lexécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 3 mai 2002.
Lionel Jospin |
Par le Premier ministre :
La ministre de lemploi et de la solidarité, Élisabeth Guigou |
Le ministre de léquipement, des transports et du logement, Jean-Claude Gayssot |
Le ministre de lagriculture et de la pêche, François Patriat |