Bulletin Officiel du Travail, de l’Emploi et de la Formation Professionnelle
No 2002/7  du samedi 20 avril 2002




Inspection du travail
Travail illégal
Union européenne

Délégation interministérielle
à la lutte contre le travail illégal

Circulaire technique en date du 5 mars 2002 concernant
l’application de l’arrangement franco-allemand du 31 mai 2001
NOR :  MESL0210042C

(Texte non paru au Journal officiel)

La ministre de l’emploi et de la solidarité à Mesdames et Messieurs les préfets de région ; Mesdames et Messieurs les préfets de département ; Monsieur le directeur de l’agence centrale des organismes de sécurité sociale ; Monsieur le directeur de la caisse centrale de la mutualité sociale agricole ; Mesdames et Messieurs les directeurs régionaux et départementaux du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle ; Mesdames et Messieurs les directeurs régionaux du travail des transports ; Mesdames et Messieurs les chefs des services régionaux et départementaux de l’inspection du travail, de l’emploi et de la politique sociale agricole.

INTRODUCTION

    Le développement important des activités transfrontalières des entreprises et des travailleurs dans l’espace économique européen a pour effet, notamment, d’augmenter le risque de fraude à la législation sociale des pays concernés.
    L’élargissement des conditions d’ouverture des droits des assurés sociaux transfrontaliers à certaines allocations sociales, notamment les allocations de chômage, dans les divers pays de l’Union européenne peut également accroître les risques de fraudes transnationales dans ce domaine.
    Dans tous les cas, le contrôle de ces fraudes est rendu difficile par plusieurs facteurs parmi lesquels :
    -  la barrière de la langue ;
    -  l’insuffisante connaissance des structures administratives de l’Etat voisin et du droit qui s’y applique ;
    -  l’impossibilité pour un corps de contrôle de poursuivre ses investigations de l’autre côté de la frontière.
    La prévention de ces risques appelle donc le développement de la coopération entre les administrations sociales compétentes des divers pays de l’Union concernés. Celle-ci commence à s’organiser dans le cadre de plusieurs textes européens qui la prévoient et notamment :
    -  le règlement CEE no 1408/71 du 14 juin 1971 relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté ;
    -  la directive 96/71/CE du 16 décembre 1996 relative au détachement de travailleurs effectués dans le cadre d’une prestation de services ;
    -  la résolution du conseil du 22 avril 1999 relative à un code de conduite pour une meilleure coopération entre les autorités des Etats membres en matière de lutte contre la fraude transnationale aux prestations et aux cotisations de sécurité sociale et le travail non déclaré, et concernant la mise à disposition transnationale de travailleurs.
    La résolution du 22 avril 1999 a ainsi préconisé que la coopération entre Etats soit organisée par des accords bilatéraux. C’est à ce titre que l’arrangement franco-allemand a été signé le 31 mai 2001 à Berlin par les ministres français et allemands chargés du travail.
    Il s’agit bien d’un arrangement et non d’un accord international qui aurait nécessité sa ratification par le parlement français. Il a donc une valeur infralégislative et limite son champ à l’organisation d’une coopération strictement administrative.
    La conclusion de cet accord intervient dans le contexte d’une coopération transfrontalière de fait entre les services d’inspection du travail des deux pays dont l’origine est déjà ancienne. Elle a permis à ces services de se connaître et de confronter leur pratiques et leurs préoccupations.
    Cette coopération manquait néanmoins d’un encadrement institutionnel dont l’absence nuisait à son efficacité. L’arrangement franco-allemand du 31 mai 2001 vient combler cette lacune. La présente note technique a pour objet d’en présenter le contenu et les modalités d’utilisation à tous les services concernés.
    Objet :
    L’AFA (arrangement franco-allemand) a pour objet la mise en œuvre et le développement d’échanges d’informations permettant aux différents corps de contrôle concernés de mener à bien leur mission de lutte contre certaines fraudes.
    Les fraudes visées par l’AFA
    Elles sont listées à l’article 1er de l’AFA.
    Il s’agit :
    -  des fraudes transnationales aux cotisations et aux prestations de sécurité sociale liées à une activité professionnelle et d’assurance chômage ;
    -  du travail non déclaré ;
    -  et des fraudes commises lors de la mise à disposition transnationale de travailleurs.
    L’AFA précise par ailleurs que leur qualification juridique est celle que prévoit la législation de chacune des parties contractantes.
    S’agissant de la recherche d’infractions à la réglementation française, il y a lieu d’apporter les précisions suivantes :
1.  Les fraudes transnationales aux cotisations et aux prestations de sécurité sociale liées à une activité professionnelle et d’assurance chômage
    Les cotisations et les prestations visées par cette catégorie de fraude sont les suivantes :
    Les cotisations de sécurité sociale sont celles dont le montant est fixé par référence à celui des revenus à caractère professionnel.
    Les prestations de sécurité sociale liées à une activité professionnelle sont celles financées et conditionnées par les cotisations.
    On peut ainsi citer le versement d’indemnités journalières en cas de maladie ou d’accident du travail.
    A contrario les allocations familiales, financées par les cotisations sociales, mais dont le versement n’est pas directement lié à l’exercice d’une activité professionnelle, ne sont pas concernées.
    Les cotisations et prestations d’assurance chômage :
    Les cotisations sont celles versées aux Assedic ou à la MSA dans le cadre du régime d’assurance-chômage.
    Les prestations sont toutes celles versées par les Assedic, qu’elles le soient dans le cadre de l’assurance-chômage ou de la solidarité, puisque toutes sont conditionnées par une activité professionnelle préalable.
    Les fraudes visées par l’AFA concernent tant celles relatives aux cotisations que celles relatives aux prestations, pour autant qu’elles aient un caractère transfrontalier.
    Les fraudes relatives aux cotisations recouvrent la notion de travail dissimulé. Ce pourra être par exemple le cas :
    -  de personnes ayant une activité, se déroulant de part et d’autre de la frontière, mais dissimulée tant en Allemagne qu’en France ;
    -  de personnes déclarant une activité dans un pays alors que leur activité s’exerce principalement dans l’autre et ce dans le but de bénéficier de charges sociales moindres.
    Les fraudes relatives aux prestations visent notamment la situation de personnes ayant une activité, légale ou dissimulée, en Allemagne qui ne l’ont pas déclarée, alors qu’elles y seraient tenues, aux services leur servant, en France, des prestations sociales.

2.  Le travail non déclaré

    Il peut viser plusieurs situations :
    -  celle de personnes ayant une activité, se déroulant de part et d’autre de la frontière, mais dissimulée tant en Allemagne qu’en France ;
    -  celle de personnes déclarant une activité en France alors qu’elle est principalement exercée en Allemagne ;
    -  celle d’entreprises employant pour des prestations de services à l’étranger, des salariés dissimulés.

3.  La mise à disposition transnationale de travailleurs

    Elle ne constitue pas en soi une infraction mais peut parfois en induire.
    Peuvent être ainsi concernées les situations suivantes :
    -  l’entreprise déclarée en Allemagne mais dont l’activité se déroule principalement en France où elle dissimule donc son activité et ses salariés.
    Il s’agit là d’infractions aux articles L. 324-9 et 10 du code du travail ;
    -  l’entreprise allemande qui fait travailler en France des salariés non déclarés aux organismes sociaux allemands. Outre qu’il s’agit d’une infraction au droit allemand, ces salariés auraient dû faire l’objet d’une affiliation temporaire aux caisses d’assurance maladie du régime général ou du régime agricole (CPAM ou CMSA). L’employeur allemand aurait dû effectuer diverses déclarations aux organismes de recouvrement des cotisations de sécurité sociale (URSSAF ou CMSA).
    Il s’agit là d’une dissimulation partielle d’activité par défaut de déclarations sociales, telle qu’elle est définie par l’article L. 324-10 du code du travail ;
    -  la prestation consistant, en fait, à du prêt de main-d’œuvre illicite et constituant ainsi une infraction aux articles L. 125-1 et/ou 3 du code du travail ;
    -  la prestation, régulière dans son principe, se faisant sans que les dispositions du droit du travail français rendues applicables par la directive 96/71/CE et par l’article L. 341-5 ne soient respectées ;
    -  le prestataire allemand employant un salarié originaire d’un pays tiers à l’espace économique européen qui :
        -  n’est pas détenteur d’un titre de travail délivré par les autorités allemandes ;
        -  est bien détenteur d’un titre de travail délivré par les autorités allemandes mais dans des conditions telles qu’il devrait également être titulaire d’une autorisation de travail délivré par les autorités françaises.
    C’est le cas lorsque ce salarié n’est pas habituellement employé dans l’entreprise qui le détache en France.
    Conformément à la circulaire DPM/DM no 4-96 du 22 février 1996, on doit considérer que le salarié est habituellement employé dans son entreprise dès lors qu’il l’est depuis un an au moins ;
    -  l’entreprise de travail temporaire qui ne respecterait les règles de mise à disposition.

Les informations susceptibles d’être échangées

    Ce sont celles qui entrent dans l’objet de l’AFA et qui s’inscrivent donc dans le cadre d’une coopération administrative.
    Elles peuvent être communiquées à la demande d’un service de contrôle.
    Elles peuvent également consister en une information réciproque sur les suites données aux procédures.
    Le cadre des échanges d’informations : la coopération administrative :
    La coopération entre services organisée par l’AFA est à caractère administratif, et s’inscrit en dehors de tout contexte judiciaire français.
    Ce principe a des conséquences importantes sur la possibilité qu’ont les services français de transmettre des informations à leurs homologues allemands.
    En effet, dès lors que le « secret professionnel » relevant de règles instituées par le code pénal (art. 226-13 et 226-14) et le code de procédure pénale (art. 11) n’a pas été levé en ce qui concerne les échanges avec les services allemands, les services français ne sont pas habilités à transmettre des informations se rapportant à une instruction judiciaire relevant de notre système juridique en cours.
    Il y a donc lieu tout d’abord de préciser la notion de coopération administrative et de tirer les conséquences du caractère administratif de cette coopération.
    Principes de la coopération administrative :
    Les services de l’inspection du travail, comme ceux de la police ou de la gendarmerie, ont tout à la fois une mission de police administrative et de police judiciaire.
    L’activité de police judiciaire consiste notamment à veiller au respect des prescriptions assorties de sanctions pénales et, si nécessaire, à constater les infractions, à rechercher les preuves et les auteurs.
    La police administrative a un rôle préventif, de surveillance.
    Elle est destinée à maintenir l’ordre public par la prévention des troubles et des infractions.
    Pour cela, elle doit :
    -  veiller au respect des prescriptions de police ;
    -  surveiller l’activité des personnes, physiques ou morales, pour prévenir toute violation des prescriptions édictées par les autorités compétentes.
    Ces deux activités ne sont pas toujours facilement identifiables, notamment lorsqu’elles sont réalisées par les mêmes agents.
    Ainsi, l’inspecteur du travail peut, dans sa mission de contrôle, vérifier les documents relatifs à la gestion du personnel (registre du personnel, bulletins de paie, relevés horaires). Il peut alors constater des infractions dont il estimera en opportunité qu’elles ne justifient pas la rédaction et la transmission au parquet d’un procès-verbal. Il pourra également constater des infractions plus importantes qu’il décidera au contraire de relever par procès-verbal et de transmettre au parquet.
    Pour l’application de l’AFA, il sera considéré que le champ de la coopération administrative concernera les faits pour lesquels l’autorité judiciaire n’aura pas déjà été saisie.
    Conséquences :
    Cette restriction aux possibilités d’échanger des informations ne devrait cependant avoir que des conséquences limitées puisqu’elle ne concerne que la communication d’informations par les services français.
    A contrario, les informations communiquées par les services allemands pourront être transmises à l’autorité judiciaire française. De la même façon, les services français pourront demander à leurs homologues des informations sur une affaire pour laquelle l’autorité judiciaire française aura déjà été saisie.
    Les informations susceptibles d’être échangées :
    Principes généraux :
    Ces informations sont énumérées aux articles 6 et 8 (4o) de l’AFA. Cette liste doit être considérée comme limitative.
    Malgré son caractère exhaustif, cette liste appelle les précisions suivantes.
    En ce qui concerne les informations relatives aux entreprises (point 6-1) :
    -  la réalité de l’activité tient compte de l’adéquation entre les moyens matériels et/ou humains de l’entreprise et son activité déclarée. Il pourra ainsi apparaître qu’une entreprise déclarant une activité de maçonnerie mais ne disposant d’aucun local, d’aucun salarié, d’aucun matériel et dont la seule adresse est celle d’une société de domiciliation n’a pas d’activité réelle.
    En ce qui concerne les informations relatives aux salariés (point 6-2) :
    -  la nature de l’occupation constatée concernera notamment le type d’emploi et la qualification ;
    -  le montant du salaire sera, dans la mesure du possible, tant celui du salaire brut que du salaire net ;
    -  les prestations sociales concernées sont celles que percevrait éventuellement le salarié.
    En ce qui concerne les autres aspects (point 6-3) :
    -  les données relatives aux demandeurs d’emploi qui bénéficient de prestations. Les services constatant qu’un ressortissant de l’autre pays a une activité indépendante ou salariée dissimulée pourront en informer systématiquement leurs homologues afin que ces derniers puissent vérifier que cette personne n’est pas demandeur d’emploi indemnisé ;
    -  les informations concernant les salariés participant à une prestation de services transfrontalière : ces informations concerneront principalement la réalité de l’affiliation à l’organisme de protection sociale du pays d’origine, la date de cette affiliation (afin de vérifier que le salarié est bien dans une situation de détachement), l’existence et la date de délivrance d’un titre de travail pour les salariés étrangers originaires d’un pays tiers ;
    -  les autorisations de mise à disposition de travailleurs temporaires. Ces autorisations sont données aux entreprises de travail temporaire étrangères par les pouvoirs publics allemands. Elles pourront donc être communiquées aux services français.
    En ce qui concerne l’article 8 (4o) relatif à l’emploi d’étrangers dépourvus de titre de travail, il convient de préciser que :
    -  cet échange d’informations entre dans le cadre de la coopération en matière de mise à disposition transnationale de travailleurs.
    La CJCE a déduit du principe de liberté de prestation de services qu’un travailleur originaire d’un pays tiers à l’espace économique européen, habituellement et régulièrement employé par une entreprise de cet espace qui effectue une prestation sur le territoire d’un autre Etat de cet espace, ne devait pas être titulaire d’une autorisation de travail, délivrée par les autorités du pays dans lequel s’effectue cette prestation, pour participer à cette dernière (arrêt CJCE, 9 août 1994, Vander Elst) ;
    -  un questionnaire sera mis en place dans le cadre de la commission mixte prévue à l’article 10 de l’AFA.
    Informations demandées par les services français :
    Les services français concernés par l’accord, en tant qu’ils peuvent demander des informations ou être amenés à en fournir, sont ceux précisés infra.
    Il ne saurait être question de donner une liste exhaustive de toutes les questions susceptibles d’être posées. On ne peut qu’en donner quelques exemples se rapportant aux situations de fraude les plus communes pour les différentes fraudes visées par l’AFA.
    Travail dissimulé :
    -  l’activité en France de tel ressortissant allemand est-elle bien déclarée en Allemagne ?
    Prestations transnationales :
    -  les salariés effectuant une prestation sont-ils effectivement détachés ?
    -  l’entreprise a-t-elle une activité déclarée et réelle en Allemagne ?
    Fraudes aux prestations :
    -  tel demandeur d’emploi exerce-t-il une activité en Allemagne ?
    Informations demandées par les services allemands :
    Les services français ne peuvent communiquer que les informations auxquelles ils ont régulièrement accès, que ce soit dans l’entreprise, dans le cadre de leurs pouvoirs habituels ou dans le cadre de la lutte contre le travail dissimulé.
    Dans ce deuxième cas, l’échange d’informations entre services est prévu selon deux modalités distinctes :
    -  les agents de contrôle chargés de la lutte contre le travail dissimulé, visés par l’article L. 324-12 du code du travail, peuvent, dans le cadre de cette mission, se communiquer tout renseignement et tout document ;
    -  ces agents de contrôle, et donc notamment ceux de l’inspection du travail peuvent, sur demande écrite, obtenir des organismes chargés d’un régime de protection sociale ou des caisses de congés payés tout renseignement ou tout document utile.
    L’information réciproque sur les suites données aux procédures :
    Le principe de cette information est défini par l’article 7 de l’AFA.
    En termes de contenu, cette information porte sur :
    Le nombre et la nature des infractions constatées par procès-verbal à l’encontre des délinquants concernés.
    Le contenu ou les résultats des jugements définitifs.
    Limites à la communication de données :
    Objet de l’AFA :
    Ne peuvent être communiquées que les données rentrant dans l’objet de l’AFA tel qu’il est énoncé par son article 1 et visées par les articles 6 et 8.
    Communication de fichiers :
    L’article 6 de l’AFA ne prévoit en ses premier et second paragraphes que l’échange de données relatives à des entreprises ou des salariés précisément définis.
    Par contre, le troisième paragraphe de cet article prévoit la possibilité de communiquer des listes, que ce soit de demandeurs d’emploi indemnisés, d’entreprises de travail temporaire ou d’avis de mise à disposition de travailleurs.
    On doit préciser à ce sujet que la loi no 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés précise que les traitements automatisés d’informations nominatives réalisés par le secteur public peuvent être transmis à un autre Etat à condition qu’existe dans ce dernier une loi sur la protection des données comparable à celle existant en France. C’est le cas en Allemagne.
    Hiérarchie des normes :
    L’AFA, ayant une valeur infra législative, ne saurait déroger à une source de droit supérieure.
    Cette situation vise notamment l’interdiction pour l’inspection du travail, en vertu des conventions 81 et 129 de l’OIT de faire état et donc a fortiori de communiquer les « plaintes » de salariés ou les informations qu’ils auraient pu donner à l’inspecteur du travail en ayant le sentiment qu’elles resteraient confidentielles.

Les services concernés et leur implication

    Les services concernés :
    Services d’inspection du travail :
    Il s’agit des services d’inspection du travail des DDTEFP, de l’ITEPSA ou encore de l’inspection du travail des transports.
    Sont concernés les services de tous les départements français, métropolitains ou d’outre-mer.
    Les services du contrôle de la recherche d’emploi (SCRE) des DDTEFP :
    Ils sont expressément visés à l’article 3 de l’AFA.
    Les organismes chargés d’un régime de protection sociale et les caisses de congés payés :
    L’article 3 de l’AFA fait référence aux informations relatives aux prestations sociales pouvant être communiquées aux services d’inspection du travail.
    Il renvoie ainsi à l’article L. 324-13 du code du travail qui précise les modalités d’information réciproque entre, notamment, les agents de l’inspection du travail et les organismes chargés d’un régime de protection sociale et les caisses de congés payés.
    Ces organismes sont notamment :
    Les organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale :
    -  pour les salariés du régime général :
        -  pour les salariés les URSSAF en métropole et les caisses générales de sécurité sociale (CGSS) dans les départements d’outre-mer ;
        -  pour les VRP à cartes multiples, la Caisse nationale de compensation des cotisations de sécurité sociale des voyageurs, représentants et placiers de commerce à cartes multiples (CCVRP) ;
    -  pour les salariés agricoles, les caisses de MSA.
    -  pour les non-salariés non agricoles :
        -  les caisses mutuelles régionales pour la cotisation personnelle d’assurance maladie ;
        -  les caisses professionnelles ou interprofessionnelles des artisans ou des commerçants ainsi que les caisses professionnelles pour les professions libérales en ce qui concerne la cotisation personnelle d’assurance vieillesse ;
    -  pour le régime des non-salariés agricoles :
        -  les caisses de mutualité agricole.
    Les organismes chargés du recouvrement des contributions d’assurance chômage :
    -  les associations pour l’emploi dans l’industrie et le commerce (Assedic).
    Les organismes chargés du recouvrement des cotisations relatives à la protection sociale complémentaire :
    -  les institutions de prévoyance régies par le code de la sécurité sociale ;
    -  les institutions de retraite complémentaire prévues aux articles L. 921-1 et L. 922-1 du code de la sécurité sociale (ARRCO et AGIRC).
    Les caisses de congés payés du bâtiment, des travaux publics, des spectacles et de la manutention portuaire.

Le rôle de ces services

    Rôle spécifique de la DRTEFP d’Alsace et de la DDTEFP de Moselle :
    Ces services ont été désignés comme devant être l’interlocuteur unique du Landesarbeitsamt de la Rhénanie-Palatinat Sarre qui est lui-même l’interlocuteur unique des services français.
    Ils devront donc recevoir, en vue de les transmettre, toutes les demandes et toutes les réponses à des questions des services allemands, émanant de services français. De la même façon, ils recevront les réponses allemandes aux demandes de renseignements français.
    La DDTEFP de Moselle est compétente pour :
    -  les informations demandées aux services allemands relatives à des situations constatées dans ce département ;
    -  les informations demandées par les services allemands et concernant des personnes physiques ou morales domiciliées dans ce département.
    La DRTEFP d’Alsace est compétente dans tous les autres cas et donc, pour tous les autres départements métropolitains et d’outre-mer.
    Pour des raisons de cohérence administrative et de facilitation des échanges, il apparaît nécessaire que, dans les cas où les deux services pourraient s’estimer concernés par une demande des services allemands, un seul ne la traite.
    Ainsi, lorsqu’un service allemand demandera des précisions et sur une entreprise basée en Moselle et sur ses salariés domiciliés dans d’autres départements, il est souhaitable que seule la DDTEFP de Moselle recueille les éléments de réponse auprès des différents services français concernés et les transmette à l’auteur de la demande.
    En raison de ce rôle central et des contacts réguliers qu’ils seront amenés à avoir avec leurs homologues allemands, ces services devront également vérifier que l’accord est correctement appliqué.
    Cette mission pourra consister en la vérification de la rapidité et de la qualité des réponses mais aussi du fait que les demandes des services allemands ou français rentrent bien dans le champ d’application de l’AFA.
    Services d’inspection du travail :
    Ces services peuvent être concernés de deux façons :
    -  ils peuvent souhaiter demander une information aux services allemands. Compte tenu du rôle attribué par l’AFA à la DRTEFP d’Alsace et à la DDTEFP de Moselle, les demandes d’informations devront« transiter » par l’un ou l’autre de ces deux services ;
    -  ils peuvent au contraire être destinataires d’une demande de renseignement émanant des services allemands. En tout état de cause, cette demande leur sera transmise par la DRTEFP d’Alsace ou par la DDTEFP de Moselle.
    Il leur appartiendra de rassembler les éléments de réponse soit à partir des informations qu’ils détiennent déjà, soit en questionnant les organismes de protection sociale concernés.
    Il y a lieu de préciser à ce sujet que la possibilité donnée par l’article L. 324-13 du code du travail aux différents services chargés de la lutte contre le travail illégal, de s’échanger des informations à ce sujet, doit permettre à ces services de répondre favorablement à une demande d’information émanant de l’inspection du travail. Il importe peu à ce sujet que cette demande d’information ait son origine dans l’application de l’AFA.
    Il apparaît conforme à la logique administrative, que les demandes d’informations émanant des services allemands et transmises par la DRTEFP d’Alsace ou la DDTEFP de Moselle à un service d’inspection du travail le soit en respectant la voie hiérarchique.
    Il en sera de même pour les réponses à ces demandes.
    Il y aura cependant lieu de veiller à ce que cette centralisation des demandes n’alourdisse pas les modalités de transmission ou n’en rallonge les délais ce qui nuirait à une bonne application de l’AFA.
    Les services du contrôle de la recherche d’emploi (SCRE) des DDTEFP :
    De la même façon, ces services peuvent être concernés de deux façons :
    -  ils peuvent souhaiter demander une information aux services allemands ;
    -  ils peuvent au contraire être destinataires d’une demande de renseignement émanant des services allemands. La liaison informatique des SCRE avec les Assedic doit leur permettre de répondre à ces demandes.
    Les organismes chargés d’un régime de protection sociale et les caisses de congés payés :
    Ces services peuvent, eux aussi, être concernés de deux façons :
    -  ils peuvent souhaiter, dans le cadre de leur mission de lutte de lutte contre les fraudes visées par l’AFA, demander une information aux services allemands. Pour cela ils adresseront, directement ou en suivant leurs procédures internes, une demande à la DRTEFP d’Alsace ou à la DDTEFP de Moselle ;
    -  ils peuvent être destinataires d’une demande de renseignements qui émanera, en ce qui les concerne, des services d’inspection du travail. Leur réponse s’inscrira alors dans le cadre de l’article L. 324-13 du code du travail.
    Forme des liaisons entre services :
    Il est de l’intérêt de l’AFA d’éviter qu’un formalisme excessif nuise à sa bonne application.
    Formalisme :
    Dans ces conditions, toutes les formes de liaison pourront être utilisées, qu’il s’agisse du courrier, de la télécopie ou de la messagerie électronique, sous la seule réserve que cette demande soit écrite.
    Langue utilisée :
    Chaque service doit communiquer dans sa langue.
    Une facilitation de la mise en œuvre de ce principe sera recherchée par la DRTEFP d’Alsace avec la DILTI. Les solutions suivantes seront étudiées :
    -  traduction, dans la mesure de ses possibilités, par la DRTEFP d’Alsace des documents qu’elle reçoit ou envoie ;
    -  mise en place de formulaires bilingues ;
    -  utilisation dès 2002 du service de traduction géré par la DAEI au profit des différentes directions du MES.

Articulation avec les bureaux de liaison

    Principes de fonctionnement des bureaux de liaison :
    La directive 96/71/CE du 16 décembre 1996 a prévu, en son article 4, la coopération entre administrations sous la forme d’un double échange d’informations :
    1.  Les informations sur le droit applicable aux travailleurs détachés.
    2.  Les informations liées à l’obligation d’assistance mutuelle entre Etats membres à l’occasion d’un contrôle.
    Conformément à cette directive, la France a donc désigné :
    1.  Un bureau d’information chargé de donner les informations sur le contenu des dispositions françaises applicables aux salariés détachés par leur entreprise pour effectuer, temporairement, en France, une prestation de services. Il s’agit de la DRT (bureau DS4).
    2.  Un bureau de coopération administrative chargé de répondre aux demandes d’informations motivées des administrations publiques à l’occasion du contrôle des entreprises. La DILTI a été désignée à cet effet.
    Dans ce cadre, et à travers ses contacts avec les bureaux de liaison des autres Etats membres, la DILTI est chargée de transmettre aux corps de contrôle français les demandes des administrations étrangères et, a contrario, de transmettre à ces dernières les demandes des services français.
    La coopération liée à la mise en place de ces bureaux de liaison et celle qui naît de l’AFA connaissent diverses différences. Elles ont cependant des points communs qui nécessitent d’établir leurs rôles respectifs.
    Différences entre le rôle des bureaux de liaison et l’AFA :
    Ces différences tiennent à celles de leur champ d’application respectif :
    Le champ d’intervention des bureaux de liaison est celui de la directive relative à la mise à disposition transnationale de travailleurs. Les informations concernées sont celles relatives à son application. Par exemple :
    -  l’entreprise contrôlée est-elle légalement constituée dans son pays d’origine ?
    -  y exerce-t-elle une activité réelle ?
    -  ses salariés détachés sont-ils bien déclarés à l’organisme de protection sociale ? A la caisse de congés payés ?
    -  les salariés originaires d’un pays tiers ont-ils une autorisation de travail ?
    Comme cela a été indiqué supra, le champ d’application de l’AFA est plus large, puisque outre ces domaines, il couvre également les activités illégales à caractère indépendant et les fraudes aux régimes de protection sociale.
    Articulation de l’AFA avec le bureau de liaison :
    Il apparaît cependant que dans de nombreuses situations relatives notamment au contrôle d’entreprises allemandes effectuant en France une prestation de services, les deux systèmes de coopération pourraient être utilement utilisés.
    Dans ce cas, il apparaît opportun de ne saisir le bureau de liaison qu’en cas de possibilité de fraude particulièrement importante.
    A contrario, il est dans la logique qui a guidé la négociation de l’AFA, d’utiliser les échanges qu’il met en place pour tous les autres cas.
    Suivi de l’application de l’AFA :
    Ce suivi doit prendre la forme d’une commission mixte dont les travaux seraient facilités, pour la France, par la réunion périodique de représentants des services concernés.
    Un bilan annuel devra également être établi.
    Commission franco-allemande :
    Conformément à l’article 10 de l’AFA, une commission mixte composée de représentants des services centraux et déconcentrés du ministère chargé du travail de la République française et du ministère fédéral du travail et des affaires sociales et de l’office fédéral de l’emploi de la République fédérale d’Allemagne se réunira au moins une fois par an afin d’évaluer les résultats obtenus et de traiter de toute question d’interprétation ou d’application de l’arrangement. La commission peut inviter des représentants d’institutions ou organismes relevant tant des parties contractantes que d’autres institutions et Etats membres de l’Union européenne intéressés à la réalisation des objectifs de l’arrangement à participer à ses travaux.
    Du côté français, cette commission pourra rassembler :
    -  comme représentants des services centraux du MES : la DILTI, la DAEI, la DRT et la DSS ;
    -  comme représentants des services centraux du ministère de l’agriculture et de la pêche : la DEPSE ;
    -  comme représentants des services centraux du ministère de l’équipement et des transports : l’inspection générale de l’inspection du travail des transports ;
    -  comme représentants des services déconcentrés : la DRTEFP d’Alsace et la DDTEFP de Moselle ;
    -  en tant que de besoin, les représentants d’autres services tels que l’URSSAF, la MSA, les Douanes ou la PAF.
    Groupes de coordination transfrontaliers :
    Ils pourront être constitués en tant que de besoin afin d’examiner les problèmes posés par l’application concrètes de l’accord.
    L’initiative en reviendra, en ce qui concerne la partie française, à la DRTFP d’Alsace.
    Groupe de travail français :
    Cette commission mixte et ces groupes de coordination pourront être préparés pour la partie française par les différents services concernés qui se réuniront sur l’initiative de la DRTEFP d’Alsace.
    Bilan d’application :
    La DRTEFP d’Alsace et la DDTEFP de Moselle ont un rôle central dans l’application de cet accord qui doit leur permettre d’en faire une évaluation qualitative et quantitative.
    Cette évaluation prendra la forme d’un bilan annuel, établi par la DRTEFP d’Alsace à la date approximative de l’anniversaire de l’arrangement et transmis à la DILTI. Il devra notamment préciser les difficultés juridiques ou méthodologiques rencontrées.
    Vous voudrez bien me faire remonter, à l’adresse de la DILTI, toute difficulté d’application de l’AFA.
    Ces informations me permettront notamment de saisir, si cela s’avérait nécessaire, la commission mixte évoquée à l’article 10.
    Fait à Paris, le 5 mars 2002.

La ministre de l’emploi et de la solidarité,
Pour la ministre et par délégation :
Le secrétaire général
de la délégation interministérielle
à la lutte contre le travail illégal,
T.  Priestley


  ANNEXE  
LE CONTEXTE ADMINISTRATIF ALLEMAND

    Par principe, les services français ne sont pas chargés de faire appliquer le droit allemand.
    Cependant, une connaissance même succincte de la réglementation et de l’organisation administrative allemandes peut permettre une meilleure application de l’accord.

Organisation administrative allemande
dans les domaines visés par l’accord
Office fédéral de l’emploi

    Il est basé à Nuremberg et dispose d’offices régionaux et de bureaux locaux de l’emploi.
    Il a un double rôle :
    -  aides diverses à la recherche d’emploi ou à la formation ;
    -  versement de prestations aux chômeurs.
    Services communaux de l’enregistrement des entreprises industrielles, commerciales et artisanales (Kommunale Gewerbeamt).

Déclaration des entreprises

    Toutes les entreprises (société ou travailleur indépendant) doivent effectuer une déclaration auprès des services communaux qui peuvent transmettre ces données à l’office fédéral de l’emploi.
    Les données ainsi saisies sont les suivantes :
    -  noms (noms inscrits au registre du commerce, au registre des coopératives ou au registre des associations, nom de famille et prénoms ainsi que noms de naissance) ;
    -  date et lieu de naissance ;
    -  nationalité ;
    -  domicile ;
    -  nombre des associés-gérants ou représentants légaux ;
    -  adresse de l’établissement, de l’établissement principal ainsi que de l’établissement antérieur ;
    -  genre d’activité déclarée ;
    -  date du commencement de l’activité ;
    -  type d’entreprise déclarée (industrie, artisanat, commerce ou similaire) ;
    -  nombre prévisionnel des salariés ;
    -  en cas de reprise d’établissements déjà existants : nom de l’ancien propriétaire ;
    -  en cas d’existence d’une autorisation d’activité : date de délivrance et nom de l’autorité l’ayant délivrée ;
    -  en cas de besoin : date du certificat d’inscription au répertoire des métiers et nom de la chambre des métiers l’ayant délivré ;
    -  en cas de besoin : date du permis de séjour et nom de l’autorité l’ayant délivré.
    Les données concernant les entreprises n’employant pas de salariés ne sont pas enregistrées sur les fichiers de l’office fédéral de l’emploi.
    Par contre, les bureaux locaux de l’emploi enregistrent et donnent un numéro d’identification aux entreprises employant des salariés.
    A partir de ce numéro et compte tenu de la centralisation des données collectées par les bureaux locaux, il est possible de connaître :
    -  numéro d’identification de l’entreprise ;
    -  raison ou dénomination sociale de l’entreprise ;
    -  adresse du siège social de l’entreprise (lieu, rue et numéro) ;
    -  classification statistique de l’activité économique de l’entreprise ;
    -  en outre, lorsque l’entreprise comprend plusieurs établissements, une description de l’exploitation ;
    -  nombre des salariés.
    Informations relatives aux salariés :
    Les services allemands disposent en ce qui concerne les salariés des informations suivantes :
    -  nom ;
    -  prénoms ;
    -  date de naissance ;
    -  adresse ;
    -  employeur du salarié ;
    -  période d’emploi ;
    -  durée hebdomadaire du travail (supérieure ou inférieure à 15 heures) ;
    -  montant du salaire ;
    -  nationalité ;
    -  numéro de sécurité sociale.
    Informations sur les bénéficiaires de prestations :
    -  nom ;
    -  prénoms ;
    -  date de naissance ;
    -  adresse ;
    -  type de prestation sociale perçue dont le bénéfice donne lieu à l’obligation de déclarer l’emploi (prestations de chômage, aide sociale, prestations de maladie) ;
    -  durée du bénéfice des prestations.

Présentation synthétique de la réglementation allemande
dans les domaines visés par l’accord
Le droit du travail

    Il se décompose en un droit du travail individuel et un droit du travail collectif (qui régit le droit des syndicats, des organisations patronales et leurs rapports dans l’entreprise ou la branche). D’autres dispositions concernent la santé et la sécurité.
    2.  Les organismes chargés d’assurer son application sont :
    a)  Le tribunal du travail.
    b)  Les services de l’inspection du travail et de la main-d’œuvre (Gewerbeaufsichtsamt) dépendant des Länder.
    c)  Services pour la santé et la sécurité sur les lieux de travail (Amt für Arbeitsschutz) dépendant des Länder.

Prestations sociales

    Tout employeur doit déclarer ses employés aux caisses de maladie, y compris les travailleurs à temps partiel percevant moins de 630 DM par mois.
    Toute personne qui demande des prestations sociales doit justifier cette demande et déclarer toute modification de sa situation.
    Deux fichiers centralisés l’un à Nuremberg, l’autre à Würzburg sont recoupés périodiquement et permettent de détecter une partie des fraudeurs.
    Par contre, lorsque l’entreprise ne déclare pas ses employés, la fraude ne peut être détectée que par des contrôles sur le lieu de travail. Ces contrôles sont réalisés par le Bundesanstaif für Arbeit, les bureaux locaux de l’office fédéral de l’emploi et les douanes.
    Les sanctions consistent en une amende administrative et éventuellement des poursuites pénales.

Emploi des étrangers

    Il y a nécessité pour eux de détenir une autorisation de travail.
    Dans ce domaine également, il est possible de comparer deux fichiers informatiques.
    Les sanctions sont soit des amendes administratives à l’encontre du salarié et de l’employeur, soit des poursuites pénales.

Détachement transfrontalier de travailleurs

    Tout prestataire de services doit faire diverses déclarations (lieu de chantier et identité des travailleurs) et respecter certaines obligations (salaire minimal et caisse de congés payés).
    A noter que cette réglementation ne s’applique que dans la branche du bâtiment.

Travail temporaire

    Les ETT doivent obtenir une autorisation d’activité soumise à plusieurs conditions :
    -  pas de procédure de faillite ;
    -  déclarations aux caisses sociales ;
    -  pas d’infraction au droit social allemand ;
    -  disposer de locaux adaptés ;
    -  disposer d’un capital suffisant ou avoir une garantie bancaire ;
    Les ETT étrangères doivent respecter la législation de leur pays.