Bulletin Officiel du Travail, de lEmploi et de la Formation Professionnelle
No 2002/5 du mercredi 20 mars 2002
Décret no 2002-232 du 21 février 2002 relatif à la mise en uvre
du délai maximum de paiement dans les marchés publics
NOR : ECOR0206084D
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre de léconomie, des finances et de lindustrie,
Vu la directive no 2000/35/CE du Parlement européen et du Conseil en date du 29 juin 2000 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales ;
Vu la loi no 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, notamment ses articles 54 et 55 ;
Vu le décret no 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité publique ;
Vu le décret no 65-97 du 4 février 1965 modifié relatif aux modes et aux procédures de règlement des dépenses des organismes publics, et notamment son article 15 ;
Vu le décret no 2001-210 du 7 mars 2001 modifié portant code des marchés publics, et notamment son article 96 ;
Vu lavis du comité des finances locales du 30 octobre 2001,
Décrète :
TITRE Ier
MODALITÉS DE CALCUL
DU DÉLAI GLOBAL DE PAIEMENT
Art. 1er. - I. - Le point de départ du délai global de paiement prévu aux articles 54 et 55 de la loi du 15 mai 2001 susvisée et à larticle 96 du code des marchés publics est la date de réception de la demande de paiement par les services de la personne publique contractante ou, si le marché le prévoit, par le maître duvre ou tout autre prestataire habilité à cet effet. Le marché indique les conditions administratives et techniques auxquelles sont subordonnés les mandatements et le paiement.
Toutefois :
- le point de départ du délai global de paiement est la date dexécution des prestations lorsquelle est postérieure à la date de réception de la demande de paiement ;
- pour les marchés de travaux, le point de départ du délai global de paiement du solde est la date dacceptation du décompte général et définitif ;
- pour les marchés industriels ou de prestations intellectuelles du ministère de la défense dune durée dexécution supérieure à six mois, le point de départ du délai global de paiement du solde ou des paiements partiels définitifs est la date de la notification de la date deffet de la décision de réception ou dadmission, si cette date est postérieure à la date de réception de la demande de paiement, arrêtées selon les modalités du marché.
La date de réception de la demande de paiement et la date dexécution des prestations sont constatées par lordonnateur. A défaut, cest la date de la demande de paiement augmentée de deux jours qui fait foi. En cas de litige, il appartient au titulaire de la commande dadministrer la preuve de cette date.
II. - Lorsque les documents contractuels prévoient léchelonnement dans le temps de phases successives dexécution et de paiement, le délai global de paiement afférent à chacune de ces phases ne peut commencer avant la date prévue au marché ou avant la date dexécution, si celle-ci est postérieure.
En cas de versement dune avance forfaitaire, le délai global de paiement de celle-ci court à partir de la notification de lacte qui emporte commencement dexécution du marché si un tel acte est prévu ou, à défaut, à partir de la date de notification du marché.
Lorsque les collectivités territoriales et leurs établissements publics demandent, conformément à larticle 105 du code des marchés publics, la constitution dune garantie à première demande ou dune caution personnelle et solidaire pour tout ou partie du remboursement dune avance forfaitaire, le délai global de paiement ne peut courir avant la réception de cette garantie ou de cette caution.
En cas de versement dune avance facultative, le délai global de paiement de celle-ci court à partir de la réception par la personne indiquée au marché des justificatifs prévus au marché pour le versement de cette avance.
III. - Le délai global de paiement expire à la date du règlement par le comptable au sens de larticle 15 du décret du 4 février 1965 susvisé.
IV. - Le délai maximum de paiement dune indemnité de résiliation est le délai maximum de paiement prévu au marché ou à défaut le délai maximum prévu par le décret du 7 mars 2001 susvisé. Il commence à courir à partir du moment où, la décision de résiliation étant notifiée, le montant de lindemnisation est arrêté.
V. - Les documents contractuels peuvent prévoir des délais de paiement spécifiques dans la limite du délai global maximum de paiement dans les marchés publics, dans les conditions définies par le décret du 7 mars 2001 susvisé.
Art. 2. - I. - Le délai global de paiement, tel que défini à larticle 1er, ne peut être suspendu quune fois par lordonnateur, avant lordonnancement ou le mandatement. Cette suspension fait lobjet dune notification au titulaire par tout moyen permettant dattester une date certaine de réception. Cette notification précise les raisons qui, imputables au titulaire, sopposent au paiement ainsi que les pièces à fournir ou à compléter. Le délai global de paiement est alors suspendu jusquà la remise par le titulaire de la totalité des justifications qui lui ont été réclamées.
A compter de la réception des justifications demandées par la personne publique contractante, un nouveau délai global est ouvert : il est de 30 jours ou égal au solde restant à courir à la date de la suspension si ce solde est supérieur à 30 jours.
Lorsque lordonnateur et le comptable ne relèvent pas de la même personne morale et sont convenus dun délai de règlement conventionnel dans les conditions prévues à larticle 7, ce nouveau délai global ne peut être inférieur à 15 jours augmentés du délai maximum prévu pour lintervention du comptable dans le cadre de ce délai de règlement conventionnel.
II. - Dans le cas particulier où notification ou signification dune cession ou dun nantissement a été faite au comptable et où celui-ci ne dispose pas de lexemplaire unique du marché en même temps que de lordonnance ou du mandat et des autres pièces justificatives, le comptable suspend le délai global selon les modalités décrites ci-dessus.
Le solde du délai global court à dater de la réception de lexemplaire unique par le comptable. Il ne peut être inférieur à 7 jours.
Il en va de même sagissant du nantissement intervenu après le jugement douverture de la procédure collective, qui ne peut être exécuté sans laccord de ladministrateur judiciaire. Le courrier par lequel le comptable sollicite cet accord suspend le délai global de paiement et indique à ladministrateur le délai dans lequel il doit faire connaître sa réponse.
Le solde du délai global reprend à réception de la réponse de ladministrateur ou, à défaut, à lexpiration du délai prévu dans ce courrier. Ce solde ne peut être inférieur à 7 jours.
La signification au comptable dune saisie suspend le délai global jusquà ce quil soit habilité à se dessaisir des fonds. Le solde du délai global ne saurait alors être inférieur à 7 jours.
Art. 3. - I. - Si lacheteur public recourt à un maître duvre ou à tout autre prestataire dont lintervention conditionne la liquidation et lordonnancement ou le mandatement des sommes dues, le délai dintervention du maître duvre ou du prestataire fait partie du délai global de paiement.
II. - Le contrat conclu avec un maître duvre ou tout autre prestataire indique le délai maximum dans lequel celui-ci doit effectuer ses interventions.
Ce délai maximum ne peut excéder 15 jours.
III. - Le maître duvre ou le prestataire habilité à recevoir les demandes de paiement est tenu de faire figurer dans létat quil transmet à la personne publique contractante en vue du règlement la date de réception ou de remise de la demande de paiement de lentreprise.
IV. - Le contrat précise les pénalités encourues du fait de linobservation de ce délai, les pénalités encourues pour inobservation de lobligation prévue au III du présent article ainsi que la faculté pour la personne publique contractante deffectuer ou de faire effectuer, après mise en demeure, les prestations aux frais du défaillant.
TITRE II
DÉLAI GLOBAL DE PAIEMENT DU SOUS-TRAITANT
Art. 4. - Le délai global de paiement du sous-traitant payé directement par la personne publique est identique à celui prévu au marché pour le paiement du titulaire.
Le délai global de paiement du sous-traitant court à partir de la réception par la personne publique contractante, ou, si le marché le prévoit, par le maître duvre ou tout autre prestataire habilité à cet effet, de sa demande de paiement, telle que transmise par le titulaire du marché.
Le délai global de paiement du sous-traitant court à partir de la réception par la personne publique contractante, ou, si le marché le prévoit, par le maître duvre ou tout autre prestataire habilité à cet effet, de sa demande de paiement, telle que transmise par le sous-traitant lui-même, dans les circonstances prévues à larticle 116 du code des marchés publics, si le titulaire du marché na donné aucune suite à cette demande et na pas apporté la preuve dun refus motivé à son sous-traitant.
TITRE III
INTÉRÊTS MORATOIRES
Art. 5. - I. - Le défaut de paiement dans les délais prévus par le décret du 7 mars 2001 susvisé fait courir de plein droit, et sans autre formalité, des intérêts moratoires au bénéfice du titulaire ou du sous-traitant payé directement.
Les intérêts moratoires courent à partir du jour suivant lexpiration du délai global jusquà la date de mise en paiement du principal incluse.
Les intérêts moratoires appliqués aux acomptes ou au solde sont calculés sur le montant total de lacompte ou du solde toutes taxes comprises, diminué de la retenue de garantie, et après application des clauses dactualisation, de révision et de pénalisation.
Les intérêts moratoires ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée.
II. - Le taux des intérêts moratoires est référencé dans le marché. Ce taux est celui de lintérêt légal en vigueur à la date à laquelle les intérêts moratoires ont commencé à courir, augmenté de deux points.
A défaut de la mention de ce taux dans le marché, le taux applicable est égal au taux dintérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le premier jour de calendrier du semestre de lannée civile au cours duquel les intérêts moratoires ont commencé à courir, majoré de sept points.
Toutefois, pour les marchés sans formalités préalables, la mention du taux des intérêts moratoires est facultative, le taux applicable est le taux dintérêt légal en vigueur à la date à laquelle les intérêts moratoires ont commencé à courir, augmenté de deux points.
III. - Le défaut dordonnancement ou de mandatement de tout ou partie des intérêts moratoires dans un délai de 30 jours à compter du jour suivant la date de mise en paiement du principal entraîne le versement dintérêts moratoires complémentaires.
Le taux applicable à ces intérêts moratoires complémentaires est le taux des intérêts moratoires dorigine, majoré de deux points. Ces intérêts moratoires sont calculés sur le montant des intérêts moratoires dorigine et ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée.
Ces intérêts moratoires complémentaires sappliquent à compter du jour suivant la date de paiement du principal jusquà la date dordonnancement ou de mandatement de lensemble des intérêts moratoires.
IV. - Le mandatement effectué en labsence de fonds disponibles équivaut au défaut de mandatement. Dans ce cas, est considérée comme date de mandatement la date de réception par le comptable assignataire de lordre écrit de versement lorsque la collectivité territoriale ou létablissement public local contractant dispose des fonds pour procéder au règlement effectif des prestations en cause ou la date à laquelle cette condition est remplie si elle est postérieure à la date de réception de lordre écrit de versement.
V. - En cas de désaccord sur le montant dun acompte ou du solde, lordonnancement ou le mandatement est effectué sur la base provisoire des sommes admises par la personne publique contractante. Lorsque les sommes ainsi payées sont inférieures à celles qui sont finalement dues au titulaire, celui-ci a droit à des intérêts moratoires calculés sur la différence.
VI. - Lorsque le dépassement du délai nest pas imputable à la personne publique contractante, ou à lun de ses prestataires, ou au comptable de lEtat au sens de larticle 67 du décret du 29 décembre 1962 susvisé, aucun intérêt moratoire nest exigible.
VII. - Les intérêts moratoires dun montant inférieur à 5 Euro ne sont pas ordonnancés ou mandatés.
Art. 6. - Lorsque les collectivités territoriales et les établissements publics locaux dotés dun comptable de lEtat ont versé des intérêts moratoires imputables, en tout ou partie, à ce comptable, laction récursoire prévue par larticle 55 de la loi du 15 mai 2001 susvisée est exercée auprès du trésorier-payeur général, qui doit procéder au règlement des sommes en cause dans les deux mois qui suivent la demande de règlement présentée par lordonnateur ou, en cas de conflit sur le partage de responsabilité entre lordonnateur et le comptable, dans les deux mois qui suivent le règlement de ce litige, le cas échéant en application de la procédure prévue à larticle 10.
TITRE IV
MODALITÉS DINTERVENTION
DU COMPTABLE PUBLIC
Art. 7. - Lorsque lordonnateur et le comptable public ne relèvent pas de la même personne morale, le comptable public dispose, afin dexercer les missions réglementaires qui lui incombent, dun délai maximum de 15 jours.
Toutefois, si lordonnateur et le comptable public ont précisé les modalités de leur coopération dans le cadre dun délai de règlement conventionnel, sur la base dun modèle fixé par arrêté du ministre chargé du budget, cest le délai maximum dintervention prévu pour le comptable public dans le cadre de cette convention qui sapplique, à lexclusion des délais visés à lalinéa précédent, dès lors que lordonnateur a tenu les engagements quil a pris dans ladite convention pour permettre au comptable public de respecter ce délai.
Art. 8. - I. - Le point de départ du délai dintervention du comptable public, tel que mentionné à larticle 7, est la date de réception par celui-ci du mandat et des pièces justificatives.
La date de réception du mandat et des pièces justificatives est constatée par le comptable public. En cas de litige relatif à cette date, il appartient à lordonnateur den fournir la preuve.
A défaut de date constatée par le comptable public, la date du mandat augmentée de deux jours fait foi.
II. - Toute suspension de paiement effectuée par le comptable public conformément au décret du 29 décembre 1962 susvisé suspend le délai du comptable.
Ce délai est également suspendu pour défaut de visa du contrôleur financier si ce visa est obligatoire lorsque le comptable ne peut pas payer pour manque de fonds disponibles. Le solde de ce délai reprend à dater de la réception de la régularisation par le comptable. Il ne peut, en aucun cas, être inférieur à 7 jours.
Art. 9. - Lordonnateur indique au comptable public, sur lordonnance, le mandat ou sur tout autre support en tenant lieu, le délai global de paiement sur lequel il est engagé, sa date de départ ainsi que la date de son expiration.
Le comptable public indique à lordonnateur la date à laquelle il a procédé au règlement dans les conditions prévues par larticle 15 du décret du 4 février 1965 susvisé.
Dans lhypothèse où le comptable public aurait, dans les conditions prévues au II de larticle 2 du présent décret, suspendu le délai global de paiement, il informe lordonnateur du point de départ et de la fin de cette suspension lorsquil indique la date à laquelle il a procédé au règlement.
Pour chaque paiement faisant lobjet dun dépassement du délai global de paiement, lordonnateur constate ce dépassement, liquide, ordonnance ou mandate les intérêts moratoires. Il transmet au comptable public un état liquidatif détaillé de ces intérêts à lappui de lordonnance ou du mandat et, selon le cas, il informe le titulaire ou le sous-traitant payé directement du dépassement du délai de paiement.
Art. 10. - Lorsque lordonnateur et le comptable public ne relèvent pas de la même personne morale, en cas de désaccord entre lordonnateur et le comptable public local sur lorigine du retard et sa répartition, lun ou lautre peut demander au représentant de lEtat dorganiser une réunion en vue dune conciliation. Chacun y participe ou sy fait représenter et peut se faire accompagner de lexpert de son choix.
TITRE V
ENTRÉE EN VIGUEUR
Art. 11. - Le présent décret est applicable aux marchés dont la procédure de consultation est engagée ou lavis dappel public à la concurrence est envoyé à la publication postérieurement au 1er mars 2002. Il entre en vigueur à compter du 1er mars 2002 pour les marchés sans formalités préalables passés après cette date.
Pour les établissements publics de santé et les établissements du service de santé des armées, la date dentrée en vigueur mentionnée à lalinéa précédent est le 1er juillet 2002.
Art. 12. - Le ministre de léconomie, des finances et de lindustrie, la ministre de lemploi et de la solidarité, le ministre de lintérieur, le ministre de la défense et la secrétaire dEtat au budget sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de lexécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 21 février 2002.
Lionel Jospin |
Par le Premier ministre :
Le ministre de léconomie, des finances et de lindustrie, Laurent Fabius |
La ministre de lemploi et de la solidarité, Élisabeth Guigou |
Le ministre de lintérieur, Daniel Vaillant |
Le ministre de la défense, Alain Richard |
La secrétaire dEtat au budget, Florence Parly |