Discours de François Rebsamen au LAB UPA 2014, 23 octobre 2014

Monsieur le Président, cher Jean-Pierre Crouzet,
Mesdames et messieurs,
Je savais que votre discours serait franc.
Je vais tâcher de vous parler avec la même franchise, et de répondre à certaines de vos interpellations.
Bien sûr, nous sommes là pour parler des problèmes, mais ce matin j’ai envie de donner un message d’optimisme, et je crois que c’est bien l’esprit de cette journée :
- L’artisanat, c’est 3,1 millions d’actifs, c’est une personne sur deux qui devient chef d’entreprise, c’est 80% de CDI obtenus après un apprentissage. C’est donc une vraie « success story » !
- L’artisanat, c’est aussi 200 000 apprentis chaque année. On peut faire mieux, c’est déjà une vraie réussite – et vous devez en être félicités.
Votre force, c’est d’abord vous-mêmes et vous êtes une force pour notre pays.
Je sais que vous avez de vraies attentes vis à vis du Gouvernement, du Parlement et de l’ensemble des décideurs du monde économique.

Les professionnels du bâtiment sont venus me voir. Je sais que la baisse des commandes publiques des collectivités territoriales inquiète. Dans le même temps, vous savez aussi, vous l’avez rappelé, qu’il faut réduire les dépenses publiques. Dans ce contexte, la loi sur la transition écologique ouvrira des opportunités. 5 milliards d’euros supplémentaires permettront à toutes les collectivités d’engager les travaux sur tous les bâtiments publics.

La moyenne d’âge est élevée parmi les artisans : elle constitue comme toujours un enjeu et une force.
L’aide du contrat de génération peut vous y aider. Elle est simple à mobiliser et accompagne l’embauche d’un jeune, le soutien de l’emploi d’un sénior. Elle s’inscrit dans une perspective de transmission des savoirs, de transmission de l’entreprise : c’est là toute l’histoire de l’artisanat..

Dans les échanges fréquents que j’ai avec les artisans, on me dit « traverser la crise, on peut y arriver. Mais ce qui est insupportable, c’est l’injustice de la concurrence déloyale ».
Je vous le dis avec conviction, nous avons fait, avec mon prédécesseur Michel Sapin, de la lutte contre le détachement illégal de travailleurs étrangers une priorité. Avec de premiers succès : la directive européenne sur le détachement comme le vote, en France, de la loi Savary.

Désormais, le donneur d’ordres est également tenu pour responsable. Il a obligation de respecter les conditions sociales de notre pays et s’il ne le fait pas, nous remonterons jusqu’à lui. Ce n’était pas possible jusqu’à maintenant. Je souhaite aller plus loin et plus fort sur ce sujet et nous travaillons en ce sens avec mes services pour compléter l’arsenal.

Voilà donc beaucoup de défis communs, et je crois que nous avons les moyens, ensemble, de les relever.

J’en viens maintenant au cœur de ce qui m’amène parmi vous aujourd’hui : l’apprentissage. Sur ce sujet, je crois pouvoir dire que l’UPA a été entendue !

Monsieur le président, vous aviez déclaré, lors de la grande conférence sociale « il faut mettre les moyens pour aider les entreprises à prendre des apprentis » :
- La nouvelle aide au recrutement de 1 000 euros destinée aux entreprises qui embauchent un premier apprenti, votée en juillet, sera élargie à tout apprenti supplémentaire. Pour les TPE elle sera, par cumul avec la prime existante, portée à 2 000 euros . Elle s’adresse aux entreprises qui ont conclu un contrat d’apprentissage depuis le 1erjuillet dernier et sera versée par les Régions début 2015. Le Gouvernement va déposer un amendement en ce sens dans le cadre du vote du budget de l’Etat pour 2015.
- Je souhaite rappeler aussi que la loi du 5 mars 2014, qui réforme la formation et l’apprentissage, avait déjà permis une réforme financière garantissant davantage de ressources financières – 300 millions d’euros d’ici 2017 - pour l’apprentissage.

Désormais, le sujet financier est derrière nous et on peut s’attaquer pleinement au nouvel enjeu majeur qu’est la qualité de l’apprentissage.

Vous demandiez une mobilisation générale, elle est là.
-Le Président de la République vous a répondu dès le 14 juillet.
Il a présidé une journée de mobilisation sur l’apprentissage le 19 septembre, qui a permis de mettre tous les acteurs d’accord sur un plan d’action visant à renforcer la qualité de l’offre d’apprentissage.
Cette journée a montré une réelle attente de l’ensemble des acteurs et un désir fort d’avancer concrètement et rapidement ;
Le relevé de décisions, remis à l’issue de cette journée, décliné par un programme de travail précis, traduit cette volonté unanime et des mesures sont déjà à l’œuvre. Notamment, je souhaite faire avancer le sujet des conditions d’emploi des apprentis mineurs. Je saisirai très prochainement le comité d’orientation des conditions de travail (COCT) afin de proposer des évolutions qui répondent à vos besoins et à ceux des jeunes tout en maintenant le niveau de protection actuel.
Vous êtes, avec l’UPA, avec le réseau des chambres de métiers et d’artisanat, pleinement associés à la démarche.
Pour soutenir l’effort, j’ai lancé au début de ce mois une campagne de communication pour valoriser l’apprentissage.

Mais surtout, et c’est le titre de cette journée, l’enjeu c’est de « donner envie ».
Vous répétez souvent que l’apprentissage n’est pas une filière destinée aux élèves « en échec », et vous avez raison de le faire. L’apprentissage, c’est une voie qui a fait la preuve de sa réussite, et d’abord dans vos métiers. Vous êtes les meilleurs ambassadeurs de l’apprentissage, au-delà même de vos métiers.
L’apprentissage est de plus en plus reconnu, dans de nouveaux secteurs, et même dans l’enseignement supérieur et, s’il ne faut pas relâcher l’effort, il faut bien être conscient que c’est une vraie victoire pour vous qui militez pour l’apprentissage depuis toujours.

On le voit, vous êtes un moteur du changement. Vous contribuez à faire changer les choses, en particulier sur le dialogue social. Vous avez montré votre capacité à innover dans le dialogue social territorial. Cela constitue d’ailleurs un des points que j’ai soumis aux partenaires sociaux dans la grande négociation sur l’efficacité et la qualité du dialogue social. Et je note avec satisfaction que vous vous engagiez avec un esprit constructif dans cette négociation importante. D’autres chantiers nous attendent, et la réorganisation des branches professionnelles n’est pas le moindre, nous y travaillons en concertation, en prenant le temps nécessaire. Je souhaitais conclure sur ce point fondamental : nous sommes partenaires dans les réformes en cours et dans les réformes à venir.